Un mot sur la tonalité africaine.
Un mot sur la tonalité africaine.
Pedro,
Merci pour ta patience. Chose promise chose due. Comme tu l’as toi-même souligné, il est difficile de parler du ton lorsque nos ordinateurs ne permettent pas la ponctuation. Pourtant, étant issus des pays à tradition orale, la tonalité et le son sont très important dans notre culture.
Je dirai en guise de préambule que je suis d’accord avec tout ce que ton professeur avait dit : Le swahili n’est pas une langue tonale. Le lingala ou certaines langues de la famille Ngala comme le ngbaka ont trois registres tonals.
Toutefois, il convient de mentionner que le swahili, en tant que langue véhiculaire, est parlé par des personnes ayant d’autres langues tonales, qu’elles soient du Katanga, Kivu, Province Orientale, ou d’une partie du Kasaï.
Revenons à notre sujet pour rappeler que phonétiquement le ton est la hauteur relative à laquelle chaque son ou chaque syllabe est prononcé.
En général les langues africaines mieux bantou ont deux tons simples : haut et bas ; et deux tons complexes : descendant et montant. Les sons complexes résultent du passage d’un niveau à un autre sur une même syllabe.
Pour permettre aux mbokatiers de mieux appréhender cette notion sur la tonalité, nous allons donner des exemples. Quitte à chacun d’en ajouterd'autres , en référence à sa propre langue.
Exemples d’oppositions tonales.
Lingala :
Moto (homme) comme l’a mentionné Pedro
Moto’ (tête)
Bongo’ (cerveau)
Bôngo’ (ainsi)
Tshiluba
Dibwé (pierre)
Dîbwe (palmier)
Kikongo
Kulöomba ( demander)
Kuloömba (être noir)
Béeno (vous)
Beéno (sein)
Chacun de nous est capable de nous fournir d’autres exemples d’oppositions tonales dans d'autres langues. En attendant, nous vous proposons une chanson de Myriam Makeba, dans laquelle le son exceptionnel Ksosa est mis en évidence.
Messager
En MPIEMON, une langue bantoue du sud ouest, il faut absolument changer de tonalité pour distinguer:
Nkoe ( la panthère) Gwo ( rire) Gwö ( tuer)
Nkoê ( le lavement) Gwô ( sommeil)
Nkoè ( le mille patte ou l'iule) Gwo' ( grimper)
Nkoé ( le sanglier) Gwò (un champignon)
BORIS
La quantité, est-ce ce qu’on a dans bôngó (ainsi) marquée par l’accent circonflexe par opposition à bongó (la tête) ? Je sais qu’on ne peut pas avoir tout le cours. Merci, Ndeko Messager. Ce sont les exemples qui restent dans la tête.
Pedro
La question de Pedro est pertinente et mérite que l’on résume autrement ce que nous avons dit sur la tonalité pour éviter toute confusion.
Bongo’ (cerveau) et bôngo’ (ainsi) tout comme les exemples de notre ami Boris constituent des cas d’oppositions tonales, à ne pas confondre avec la quantité.
Le ton est la hauteur à laquelle chaque son ou chaque syllabe est prononcé, de sorte qu’un même mot peut changer de sens en fonction de la tonalité utilisée (Bongo’ et Bôngo’ par exemple).
Tandis que la quantité ou la durée est le laps de temps mis pour réaliser un son. ( Il y a des sons brefs et des sons longs).
Dans les langues africaines, il est recommandé de noter la quantité longue par le redoublement du signe employé pour symboliser le son.
Le lingala et le swahili n’ont pas le phénomène de quantité vocalique
On distingue deux sortes de quantités :
A. La quantité vocalique : qui affecte souvent les voyelles
Exemples d’oppositions vocaliques.
Tshiluba : Kubala (compter)
Kubaala (étendre)
Tshokwe : Kuzika (cacher)
Kuziika (enterrer)
Qui peut nous trouver d’autres exemples d’oppositions vocaliques en Kikongo ?
B. La quantité consonantique : plus rare, néanmoins présente dans certaines langues Bantou.
Exemple d’oppositions consonantiques.
Tetela : Oca (terre défrichée)
Occa (poison).
Donc, ce qu’il faudra retenir est que le ton est la hauteur à laquelle chaque son ou syllabe est prononcé, tandis que la quantité ou la durée c’est le laps de temps mis pour réaliser un son .
Messager
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Je ne parviens pas à établir, en pratique, la vraie différence entre l’accent tonique (word stress en anglais) dans les langues indo-européennes et le ton dans les langues tonales. Je ne dis pas que je voudrais tout savoir, et j’espère que toutes ces analyses semi-techniques ne soient pas en train d’agacer les mbokatiers des sciences appliquées.
Pedro
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Pedro,
Pour essayer de répondre à ta question, je vais te situer sur le placement du ton dans les langues bantou où il existe aussi l’accent dynamique, quitte à toi de trouver la différence avec l’accent tonique dans les langues indo-européens.
Place du ton.
Normalement dans une langue tonale, chaque voyelle doit porter un ton. Parmi les consonnes, seule la nasale peut porter un ton, il s’agit alors d’une nasale syllabique.
Ex. en Kikongo : `n-kéento « femme »
Tshiluba : `m-mêmé « c’est moi »
L’intensité ou l’accent dynamique.
L’intensité est la force relative avec laquelle un son ou un groupe de sons est réalisé. Dans les langues africaines, ce trait n’a pas de veleur distinctive, il y est généralement mal perçu à cause de l’influence trop forte des tons.
Deux systèmes ont été discernés dans les langues bantou où l’intensité est assez clairement perceptible.
L’accent dynamique affecte l’avant-dernière syllabe.
Ex : swahili : ku’ona (voir)
L’accent dynamique affecte la première syllabe du radical.
Ex : mongo : bo’konzi (chef)
Messager
Source: Cours de linguistique africaine
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En Kikongo le mot "Menga" peut se prononcer:
-Menga ( menga) donc : le sang
-Menga ( meengá !!!) : du sang !!! (en s'exclamant )
-Menga (mênga ) : la poêlle (kikalungu, en lingala)
-Menga (mènga ) : hair , éviter
Autre exemple :le mot "Vata"
-Vata (vata ) : le village
-Vata (váta ) : cultiver
-Vata (vâata): éparpiller ou gratter (comme la poule gratte partout en cherchant la nourriture ,éparpillant par-ci par-là la terre ) .
LUSED
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Mbube, par Myriam Makeba aux USA en 1960