La petite histoire d’Air Congo/Air Zaïre
La petite histoire d’Air Congo/Air Zaïre
Au lendemain de l’indépendance, le Congo se heurte à la mobilité de ses concitoyens. Dans l’immense territoire, le Congolais a du mal à joindre certains coins du pays. Des petites sociétés existent bel est bien mais elles ne sont pas congolaises. La fibre nationaliste aidant, la nécessité de se doter d’une véritable société nationale aérienne s’avère indispensable. Car vu l’étendue du pays, l’avion est le seul moyen capable de raccourcir les distances qui séparent les différentes grandes villes. Le 1er juin 1961, un décret-loi du gouvernement congolais crée Air Congo. Le capital social de la nouvelle société est de 200 millions de francs belges. Avec 130 millions de FB injectés, la République du Congo détient la majorité des titres de la nouvelle compagnie aérienne congolaise (260.000 des 400.000 actions de 500 francs soit 65 %) ; la Sabena qui en possède 120.000 soit 30 % est donc actionnaire minoritaire tout comme Air Brousse (2,5 %), Air Brousse Léopoldville (0,5 %), Air Brousse Kasaï (0,5 %), Sobelair (1,25 %) et SEPA (0,25 %). La Sabena va aussi assurer le personnel, l’équipement et l’assistance technique. Une nouvelle page de l’aviation civile au Congo commençait à s’écrire. Air Congo est officiellement né le 6 juin 1961.
En ce début des années 60, Air Congo est l’une des rares sociétés nationales de navigation aérienne en Afrique noire sortie à peine de la colonisation. Il dessert presque tout le réseau domestique mais aussi quelques pays africains dont certains sont encore des colonies. Les premières destinations africaines sont Luanda, Ndola, Salisbury (Harare), Entebbe, Nairobi, Lagos, Usumbura (Bujumbura), Kigali et Johannesburg. Sa flotte se compose essentiellement des avions Douglas (DC-3, DC-4, DC-5, DC-7), des Cessna, des Convair CV 440, des C 47 et C 54 A.
En juin 1966, Air Congo fête son cinquième anniversaire. Cet anniversaire est salué par l’acquisition du premier gros porteur et du premier Boeing pour ses longs courriers. C’est un Boeing 707. Cet événement est annoncé à grand renfort de publicité avec la publication du livre "Air Congo : pour un cinquième anniversaire 1961-1966" dont le mot d’introduction est revenu au député national Hubert Sangara, le président de la compagnie nationale. Des artistes-musiciens sont mis à contribution pour marquer ce succès d’une pierre blanche. Dr Nico (5e anniversaire Air Congo, Souvenir Air Congo), Kwamy (Premier Boeing, Gaby), ont mis la main à la patte avec un super 45 tours de l'African Fiesta sans oublier Chuza K. Joseph (Mobembo na Air Congo) et Makacha Harry (Mobembo mokuse) avec l’orchestre City Five Afro Lipopo.
En 1971, la société qui désormais s’appelle Air Zaïre s’offre des nouveaux aéronefs. Son impressionnante flotte possède des Caravelle, des DC-8 (Ville de Kinshasa et Domaine de la Nsele) , des Fokker (Boende, Goma, Kisangani), des DC-10 (Mont Ngaliema) et des Boeing 735 (Lac Tumba, Lac Upemba et Lac Maindombe). En 1973, Air Zaïre se dote d’un Boeing 747 appelé aussi Jumbo Jet. Lorsque la même année, Mobutu effectue son voyage dans l’empire du Milieu à bord du Mont Ngaliema, le pays de Mao est encore un pays fermé. L’histoire a retenu que l’avion piloté par Simon Diasolua Zitu fut le tout premier DC-10 à se poser sur le sol chinois. Cet appareil mythique avec ses trois réacteurs fut le fleuron de la flotte d’Air Zaïre et aussi la fierté de tout un peuple.
Au milieu des années 70, le gouvernement réquisitionne souvent des avions de la société d’État perturbant ainsi les horaires des vols commerciaux déjà établis. Cette intervention intempestive provoque des retards et des annulations des voyages au grand dam des clients. Le dérèglement de la prestation d’Air Zaïre finit par ternir son image de marque, l’assurance de voyager à bord de ses aéronefs n’étant plus évidente. Le Zaïrois qui est maître dans l’art de la dérision et comme pour régler ses comptes finit par donner le surnom ″Air Peut-Être″ à la compagnie nationale.
Avant 1986, année de l’achat de l’avion présidentiel ″Ville de Lisala″ au milliardaire saoudien Adnan Khashogi, le DC-8 ″Domaine de la Nsele″ qui l’a conduit à Taïwan en avril 1971 puis plus tard le DC-10 ″Mont Ngaliema″ qui porte le nom du palais présidentiel étaient les aéronefs préférés du président Mobutu. Il les avait tour à tour utilisés pour ses voyages à travers le monde. Jusque dans les années 1977, Air Zaïre fut la plus importante société aérienne africaine après la South African Airways. Sur l’empennage de ses avions, Air Congo puis Air Zaïre a utilisé trois différents logos : l’étoile dorée sur fond bleu (1961-1966), le léopard bondissant (1966-1972) et le léopard volant (1972-1995).
Samuel Malonga