Questions culturelles et artistiques
C. DES RECOMMANDATIONS EN MATIERE DES QUESTIONS
CULTURELLES ET ARTISTIQUES
La culture d’une société à un moment déterminé de son histoire est l’expression consciente et
dynamique que les hommes qui le composent ont de leurs activités économiques et politiques,
de leurs rapports avec la nature ainsi que des rapports sociaux existant entre eux.
Ainsi, le développement d’un pays est d’abord et avant tout affaire de culture.
De ce qui précède,
Votre Commission Recommande :
i. Concernant la politique culturelle
Considérant le rôle éminent que joue la culture dans l’affirmation, la préservation de
l’identité culturelle nationale, fondement de la nation ;
Considérant la contribution indispensable qu’elle est censée apporter au développement de la
nation ;
Etant donné la marginalisation dont elle a fait l’objet pendant les trois décennies successive,
votre Commission recommande au gouvernement de transition :
1. la redéfinition de la politique culturelle nationale par :
- la dénonciation de la politique de recours à l’authenticité ;
- et l’élaboration d’une CHARTE CULTURELLE à partir des objectifs définis par la
conférence nationale souveraine.
2. l’inventaire des ressources et informations disponibles en vue de la planification et de
la programmation des différentes étapes nécessaires à sa réalisation,
3. la révision du mode de gestion nationale de la culture de manière à stimuler la
créativité populaire et à encourager la mise en valeur des potentialités individuelles et
collectives
4. la réorganisation du ministère de la culture et des ses principales institutions de
manière à répondre aux exigences de la décentralisation et à confier l’animation des
différentes structures de ce ministère aux professionnels de la culture.
5. la mise en place d’un CONSEIL SUPERIEUR DE LA CULTURE constitué
essentiellement des délégués de différentes corporations professionnelles et sociétés
savantes, et fonctionnant comme instance permanente de conseil auprès de ministère.
6. la convocation dans les meilleurs délais des ETATS GENERAUX DE LA CULTURE
pour étudier les implications concrètes de ces options nouvelles.
ii. Concernant la préservation et la promotion e l’identité culturelle.
Considérant que la conscience historique est le fondement de la conscience nationale, cette
dernière conditionnant l’existence de la Nation elle-même ;
Considérant que l’identité nationale est la synthèse dynamique des identités locales et que
l’aspiration au mieux-être est fonction de l’identité originelle ;
Considérant que le souvenir du passé est immortalisé par la commémoration des fêtes
nationales et l’érection des monuments du passé ;
Votre Commission recommande :
6. la prise en compte de toutes les cultures Zaïroises par la mise en place d’une
stratégie de recherche, de connaissance et de promotion des multiples composantes
de l’héritage commun du passé,
7. la mise en place d’un MUSEE D’HISTOIRE NATIONALE ayant en charge la
conservation des vestiges du passé et abritant en son sein une cellule de recherche
chargée de la réécriture de l’histoire nationale et que ladite cellule fonctionne
comme un organe consultatif dans la politique de désignation des noms de rues et
de places publiques ;
8. l’exhortation des acteurs historiques à écrire leurs mémoires et les artistes à
s’inspirer entre autre des thèmes historiques dans leur production ;
9. la débaptisation à titre symbolique des certaines avenues de places publiques
afin de mettre en honneur les marques du changement et de la nouveauté ;
10. la nécessité de fixer la nouvelle nomenclature des fêtes nationales et de
promouvoir l’érection des monuments ;
11. la création d’un institut national des monuments et sites historiques ayant pour
tâches d’ériger des documents, d’assurer leur protection et leur gestion ainsi que
celles des sites historiques et archéologiques, des bâtiments et villes historiques ;
12. l’octroi à cet institut des moyens conséquents pour assurer la mise ne place des
grands monuments d’immortalisation des grands monuments de l’histoire
nationale et des ses principaux pionniers tels qu Simon KIMBANGU, Patrice
Emery LUMUMBA ainsi que les martyres de la République ;
13. la restitution à notre territoire national sa dimension historique par la
réhabilitation et le recyclage aux lieux et sites originels d’implantation des
monuments coloniaux déboulonnés, et par l’érection d’autres monuments d’intérêt
historique, scientifique et culturel (héros, martyrs, artistes, savants, etc.) d’autre
part.
14. la dénonciation du culte de la personnalité et l’interdiction d’ériger les
monuments des personnes encore vivantes et d’attribuer leurs noms à des avenues
et places publiques.
15. la réhabilitation des emblèmes nationaux tels que défins dans la constitution de
Luluabourg.
iii. Concernant la conservation et la mise en valeur du patrimoine national
Considérant que la conservation du patrimoine culturel est la condition sine qua non de la
conservation de la mémoire historique du peuple,
Reconnaissant le rôle que joue la mise en valeur du patrimoine culturel dans la conciliation du
peuple avec son identité originelle et son génie créateur ;
Considérant que la puissance coloniale s’est évertuée à occuper nos populations autochtones
de leurs racines culturelles, les rendant ainsi incapables d’assumer leur destin ;
Votre Commission recommande de :
1. amélioration des conditions de conservation, de gestion et de
protection du patrimoine national ;
2. mettre en place des institutions culturelles adéquates et accessibles
au grand public ;
3. placer les oeuvres achetées par l’Etat sous la protection des musées
ad hoc ;
4. inviter les privés à déclarer leurs oeuvres de valeur et favoriser la
création des associations des amis des musées ;
5. créer des galeries nationales d’arts modernes et des comptoirs
d’artisanat culturel chargés de la commercialisation des créations
plastiques nationales aussi bien au pays qu’à l’étranger ;
6. organiser et /ou participer aux manifestations promotionnelles
nationales et internationales (foires, festivals, carnavals, biennales,
salons, prix de création artistique ou artisanale, prix du livre, etc.)
7. participer à l’alimentation des collections des musées et créer des
centres culturels ainsi que des cités des artistes et artisans ;
8. mettre les média (radio, télévision notamment) au service de la mise
en valeur du patrimoine culturel pour faire apprécier les trésors et
chefs d’oeuvre de la culture nationale et inciter la population à une
large participation ou processus de communication sociale en
suscitant et les producteurs en stimulant éventuellement les
intervenants ;
9. poursuivre les démarches concernant le contentieux culturel belgozaïrois
notamment la restitution des oeuvres d’art traditionnel et
d’art moderne par le musée Royal de l’Afrique Central
(TERVUREN) et des peintures conservées au cabinet Royal des
Estampes ;
10. engager des démarches pour l’achat des premières peintures et
sculptures Zaïroises modernes contenues dans la collection
DIERICKX de Bruxelles menacée de disparition à cause de son
rachat progressif depuis les années 1980 par les musées et les
collectionneurs occidentaux ;
11. évaluer l’effectivité de la collection nationale de l’Institut des
Musées Nationaux du Zaïre et la situation des oeuvres d’art achetées
pour la décoration des édifices publics : bureau de la Présidence,
cité de l’OUA, bureaux ministériels de l’Administration publique,
Palais de la Nation, Palais du Peuple, Palais de Marbre, cité de la
N’sele, Hôtel de ville, etc.
12. protéger ns musiques et danses traditionnelles contre le bradage et
assurer leur revalorisation : collecte, adaptation, édition, diffusion ;
13. transformer l’actuel service du journal officiel en un centre de
documentation ayant en charge entre autres les publications
officielles et la banque des données informatisées.
iv.Concernant la protection de la création culturelle et artistique
Considérant que la création culturelle et artistique est l’expression par excellence de l’identité
et du génie du peuple ;
Considérant l’absence totale des structures éditoriales performante pouvant encourager la
création ;
Considérant la situation actuelle de la société Nationale des Editeurs, Compositeurs et Auteurs
(SONECA), l’absence des mécanismes de protection et de défense de droit d’auteur contre par
exemple de plagiat et la piraterie ;
Votre Commission recommande :
1. la réhabilitation des structures éditoriales existantes en les dotant
des équipements modernes et des budgets conséquents pour assurer
les acquisitions des matières premières et autres pièces de
rechange ;
2. la création d’autres structures éditoriales sur toute l’étendue du pays
gérée de manière transparente et rentable sur le plan économique et
financier ;
3. la mise en place des structures modernes pour l’édition musicale
(littérature musicale, parties et partitions, ouvrages sur la
musique…) ;
4. la multiplication des infrastructure s permettant la consommation du
livre : bibliothèques, salles et clubs de lecture, foire du livre etc. ;
5. l’organisation des campagnes de sensibilisation à la lecture avec
l’aide des animateurs culturels, des concours saisonniers, des
expositions, festivals, biennales avec attribution des prix ;
6. le soutien aux associations engagées dans la promotion du livre, la
lecture, la critique littéraire et l’édition ;
7. l’offre des chances égales à tous les fils et filles du pays doués de
talents artistiques à se faire découvrir et à s’épanouir où qu’il se
trouve ;
8. l’octroi des bourses et des facilités nécessaires en vue de l’éclosion
des talents ainsi découverts ;la mise en place de nouvelles structures
de gestion et de protection des oeuvres de l’esprit sans
discrimination ni subordination des uns aux autres ;
9. l’élaboration d’une nouvelle législation solide en matière de gestion
(perception et répartition) et de protection des droits d’auteurs
principalement des droits étrangers ;
10. l’organisation des campagnes de sensibilisation des sociétés, des
contribuables et publics ;
11. le recouvrement des redevances dues à la diffusion des oeuvres de
l’esprit (littéraires, théâtrales, musicales, chorales ou autres) par
l’office Zaïrois de Radiodiffusion et de Télévision (OZRT)
v. Concernant la promotion des industries et la réhabilitation des infrastructures
culturelles
Considérant l’absence quasi-totale d’une industrie culturelle performante et l’état de
délabrement des infrastructures existantes, cause principale de la baise quantitative et
qualitative de la production culturelle nationale ;
Considérant les pertes énormes causées par l’exode des créateurs Zaïrois et leur émigration
dans le pays mieux équipé ;
Considérant l’importance des infrastructures culturelles et la nécessité pour l’artisanat Zaïrois
d’accéder au stade de production en série et en grande quantité ;
Votre Commission recommande :
1. l’implantation des industries culturelles performantes par la création
et la promotion :
- d’une industrie du disque comprenant un studio d’enregistrement
multipiste, d’une unité de pressage du disque et de fabrication des
matrices ;
- d’une technologie adaptée à la facture et la fabrication de certains
instruments de musique et de matériel musical ;
- d’une industrie du livre et imprimés avec une usine de pâte à papier ;
- d’une industrie de son et images doté d’un centre de production
cinématographique, d’un laboratoire photographique et d’une unité de
production des films et cassettes vidéo ;
- enfin, d’une industrie des arts de spectacles dotée entre autres d’une
compagnie nationale de production et de diffusion des spectacles, etc. ;
2. l’organisation et l’intégration des MPE dans le circuit de production
et de diffusion des espaces culturels pour enfants ;
3. la promotion des industries culturelles privées par des aides directes
et indirectes, des mesures d’incitations et des crédits bancaires pour
industries culturelles ;
4. la réhabilitation des infrastructures culturelles et des gros
équipements existants et la mise en place d’autres à travers tout le
pays en vue de garantir avec plus de succès la créativité, la
production, la conservation, l’animation, la diffusion et la
promotion des oeuvres de l’esprit ;
5. la création pour ce faire, des centres culturelles nationaux,
régionaux, sous-régionaux et locaux sous forme de micro-structures
dirigées par des animateurs professionnels notamment la
construction :
- d’une maison de la culture comprenant une salle polyvalente, une
bibliothèque et des salles de jeux au sein de toute agglomération de plus de
10.000 habitants ;
- d’un centre culturel avec salles de spectacles et d’une bibliothèque au
sein d’une agglomération de plus de 100.000 habitants et dans toutes les
municipalités ;
- d’un complexe culturel comprenant au moins une grande salle de
spectacles, un hall d’exposition, une bibliothèque et une salle de lecture
dans toute agglomération de plus d’un millier d’habitants et dans le chef
lieu de régions ;
6. l’exploitation du Palis du peuple comme PALAI DE LA CULTURE
conformément au voeu déjà exprimé par le Zaïre auprès de
l’UNESCO pour en faire le siège des principales institutions
culturelles nationales dont les activités intéressent directement le
peuple ;
7. la récupération des infrastructures culturelles et autres bâtiments de
la culture hérités de l’époque coloniale, spoliés à Kinshasa et en
région, notamment les réseaux des bibliothèques publiques et
d’archives, les parcs d’expositions, les bâtiments qui abritaient les
administrations régionales de la culture ;
8. l’affectation des biens immeubles de l’ex-parti-Etat à la culture
notamment aux associations culturelles pour assurer l’éducation
artistique des populations après la dépravation des moeurs et la
destruction des bâtiments de l’Institut National des Arts à la Grande
Place Cultrana ;
9. la mise en place d’une Régie de Construction des Etablissements
culturels (RECEC) chargée de l’entretien, de la réhabilitation et de
la construction des bâtiments de la culture : salle des spectacles,
salles de cinémas et des conférences, centres culturels, galeries
d’art, bibliothèques, villages des artistes, comptoirs d’art, sièges des
entreprises culturelles, etc. ;
10. la prévision des infrastructures culturelles dans la législation
notamment en matière d’agrément des plans de construction ou
d’urbanisation des villes ou nouvelles cités à créer ;
11. la mise à contribution des techniciens, artistes, animateurs et autres
utilisateurs dans les projets d’implantation des infrastructures
culturelles, et celles des organismes internationaux dans leur
financement.
vi. Concernant le financement de la culture
Considérant la modicité chronique du budget alloué à la culture depuis de nombreuses années
et la non exécution des subsides affectés au fonctionnement des associations culturelles ;
Considérant l’importance du financement de la culture par les pouvoirs publics et les privés
sans négliger les apports des artistes ;
Votre Commission recommande :
1. de financer la culture par la contrition des ressources diverses,
notamment :
- les subventions de l’Etat ;
- les différents fonds publics ;
- la banque des crédits culturels ;
- las apports des municipalités ;
- la coopération culturelle ;
- l’autofinancement par l’organisation des productions des artistes ;
- les subsides aux PME culturelles sous le régime de contrats-programmes
soumis à une évaluation périodique.
2. de prendre une loi sur l’exonération fiscale des entreprises
(sponsors) qui financent la culture et de pratiquer une politique
tarifaire préférentielle pour artistes ;
3. de planifier la culture par la mise sur pied des plans de
développement culturel à court, moyen et long terme ;
4. de prévoir dans tout budget de construction d’un édifice public un %
réservé à la décoration ;
5. de faciliter l’approvisionnement des artistes en matière première et
en équipement ;
6. d’accorder des facilités de publicité aux artistes, producteurs et
animateurs culturels auprès des médias officiels en compensation
des services rendus et des prestations diverses.
vii. Concernant l’animation culturelle et l’audio-visuel
Considérant la confusion délibérément créée autour des termes « Animation » et
« Animateur » culturels, confusion contre tenue par les groupes chocs dits d’animation
sociale, rurale et culturelle ;
Réaffirmant que l’animation est une action de médiation auprès de différents groupes et
catégories de personnes (enfants, jeunes, adultes, femmes, personnes handicapées et de
troisième âge) situés dans les milieux les plus divers (quartier, collectivité, entreprise,
administration, écoles ,etc. ) et que le concept d’animation regroupe en somme, les notions
de communication, de participation et d’adaptation à un monde mobile et changeant dans
lequel l’animateur a la mission de sensibilisation de la population à l’action et à la démocratie
culturelle,
Votre Commission recommande :
1. la catégorisation des animateurs culturels professionnels qui sont
des cadres supérieurs et des agents spécialisés d’action culturelle
formés dans les instituts supérieurs et universitaires d’animation ;
2. la prise ne compte des cadres suivants dans cette catégorisation :
a) les cadres supérieurs et les techniciens d’action culturelle ;
b) les dirigeants et coordinateurs des institutions et
entreprises culturelles ;
c) les animateurs spécialisés dans les domaines techniques
(arts, sport, audio-visuel, activité des vacances, habitat,
conseil éducatif ou psychologique, éducation civique, etc.)
d) las attachés et conseiller culturels d’ambassades ;
e) les cadres de base (régionaux, sous-régionaux et locaux) ;
3. la formulation des politiques intégrées en matière de communication
sociales en tenant compte aussi du potentiel culturel des média que
leurs dangers et faire en sorte que l’élaboration de ces politiques
fasse l’objet d’une large participation ;
4. la réhabilitation de la Radio et Télévision Scolaire (RATELESCO)
dans ses fonctions originelles de production, de promotion et de
diffusion des programmes éducatifs et scolaires ;
5. le développement des médias pour exprimer l’identité culturelle
nationale et édifier une société meilleure ;
6. la création au sein des écoles à tous les nivaux, d’un bureau d’action
et d’animation culturelles dirigé par un professionnel de la culture
faisant partie du corps enseignant ;
7. l’affectation de conseillers culturels au Ministère de l’Education
Nationale et auprès de ses structures décentralisées ;
8. la réhabilitation de l’enseignement artistique (p.ex. musique,
théâtre, dessin, etc.) ;
9. la programmation des activités culturelles à l’école (récitals de
poèmes, spectacles de théâtre, projections cinématographie,
expositions d’art…) et l’organisation sous forme de compétitions
scolaires des festivals de théâtre, de musique et de danse ;
10. la construction ou la réhabilitation au sein des écoles des
bibliothèques et salles de spectacles, des conférences et de jeux ;
11. l’organisation des tournées artistiques interscolaires et des
expositions itinérantes.
viii. Concernant la circulation des biens culturels et de la coopération
culturelle
Considérant que la circulation libre et rapide des biens, spectacles, services culturels,
conformément aux normes établies par la communauté internationale enrichit la vie des
peuples et les aide à mieux se connaître les uns les autres ;
Considérant l’importance du tourisme culturel dans l’amélioration de l’image de marque du
Zaïre à l’étranger et le développement culturel, économique et social du pays ;
Considérant que la multiplicité des organes nationaux de gestion de la coopération culturelle
et de la francophonie conduit à, l’anarchie, donc à l’inefficacité consciente de l’importance de
la francophonie dans la coopération au sein de l’espace francophone et du danger d’aliénation culturelle liée à cet état.