Les joueurs des légendes (1)
FINS DE CARRIERE TRAGIQUES DE NOS JOUEURS DES LEGENDES
Dans cet article, nous allons mettre en exergue comment certains de nos joueurs ont mis fin à leur carrière, pourtant brillantissime. Nous reviendrons sur des cas marquants que certains parmi nous ignorent. Ceux qui savent aussi les circonstances ayant entraînées une fin de carrière anormale de nos footballeurs peuvent nous enrichir. Ceux qui auront des précisions sur cet article, peuvent nous compléter. Ce sera avec un grand plaisir que nous les entendrons aussi. Et cela dans l'esprit « mbokatiste ».
1. FIN DE CARRIERE TRAGIQUE: KALALA « TELEVISION »
Notre pays a toujours produit des gardiens de grande valeur. Surtout dans les années '70. Kalala « Télévision » est l'un d'eux. De son temps, il fut avec Robert Kazadi, Kalambayi Otepa et Tubi Landu un des meilleurs gardien du Zaïre, bien loin devant Kanyinda « Surich » de Sanga Balende. « Télévision » atteint la renommée dans l'équipe de Tout Violent Tshipepele de Kananga. Il a évolué dans cette équipe avec Katanga dit Muller, Tshiunza « Intelligence » etc...Lors d'une des éditions de la coupe du Zaïre, dans les années '70, TV Tshipepele perdit contre Sanga Balende par 1-0, but de Kapafula. Suite à cette défaite, presque tous les joueurs de TV Tshipepele quittèrent ce club. C'est ainsi que Katanga, Mbinga firent leurs valises pour Daring Faucon et Kalala partit pour l'AS Bantou de Mbuji-Mayi, Tshikulu wa mu nkunduyi. Tout sportif de Mbuji-Mayi connaît l'intensité de la rivalité sportive qui existe entre Sanga Balende et l'AS Bantou. Leurs affrontements ont toujours donné lieu à des épopées homériques...C'est ainsi que deux « monstres » du ballon rond s'affrontaient régulièrement lors de ces derby. Du côté de l'AS Bantou, wa mu nkunduyi, il y avait Kalala « Télévision ». Du côté de Sa Majesté Sanga Balende, wa banjelo ne ba nsantu, il y avait le mythique Ndaya Mukuba wa mbelenga, Dianda dia Kazembe. Alors, Kalala lança un défi, connu de tout sportif de Mbuji-Mayi: « jusqu'à la fin de sa carrière, il n'encaissera jamais de but de Ndaya »...Voilà le décors d'affrontement bien posé entre ces monstres sacrés du ballon. Il faut préciser qu'aucun grand gardien, au Zaïre, ne pouvait tenir tête impunément à Ndaya Empire...Kalambayi Otepa de TP Mazembe s'en souviendra toute sa vie: but encaissé à la 50ème seconde alors qu'il était encore en train de se réchauffer dans ses buts...ou plus inoubliable, la finale Bilima-Sanga Balende à Kinshasa dans les années '80. Tout le monde se rappelle encore, surtout Muindu, le gardien de Bilima, le missile qui brûla ses filets. Ceux qui avaient suivi ce match à la télévision, je crois qu'ils se souviennent encore de la dilatation de leur écran de télévision suite à la force de ce tir (rire..). Le gardien Kalala « Télévision » s'habillait comme l'inoubliable gardien Robert Mensah de l'Ashanti Kotoko de Kumasi: tout en noir, avec une inamovible casquette vissée sur la tête. Revenons à Ndaya et Kalala. Dans le cadre du championnat de Mbuji-Mayi, Union Infanterie de Mbuji-Mayi ou SM Sanga Balende devait croiser le fer avec Tshikulu wa mu nkunduyi, mudi nkulu ibanda, AS Bantou. Et le « match dans le match » eut lieu encore ce jour là... Kalala était impérial et intraitable sur toute action de Ndaya. En milieu de la deuxième mi-temps, alors que les deux équipes étaient à zéro but partout se déroula une phase de jeu qui est resté historique jusqu'aujourd'hui pour les sportifs de Mbuji-Mayi: sur une descente de SM Balende, Mukendi « Double » exécute un contrôle impeccable suivi d'un dribble sur son vis à vis. « Empire », dans son style, se démarque de son garde du corps. Il fait un appel de ballon, « ndundu wa lukungulu » c'est à dire un ballon qui rebondi à hauteur du genou...On sait, sur ce genre de ballon, ce qui arrive aux gardiens en face de Ndaya. Mukendi envoie effectivement une balle de « lukungulu », balle qui rebondi à hauteur de la taille d'une chèvre. C'est le rituel des appels de ballon de Ndaya. Donc Kalala avait bien décrypté l'action. Il s'avance et ferme l'angle de « reprises de Ndaya ». La balle arrive et rebondi à hauteur du genou...Tous les balende ba mpibua se mirent debout pour voir le missile. Kalala TV face à Ndaya avec un ballon en « lukungulu », inédit. Alors là, chose étonnante. Contrairement à ses habitudes, Mukuba arme sa légendaire reprise de volée, temporise une fraction de seconde, lit la position de Kalala TV...et d'une balle molle en lob, il envoie le ballon dans les filets de Kalala TV...Consternations et pleurs chez les corbeaux de l'AS Bantou, fête et liesse chez les Rouges et Or. Le match se termine par un but à zéro pour SM Balende. Le lendemain, Kalala « Télévision » fait ses valises. Il part à Kankenga et se reconvertit dans les plantations de maïs et met fin, de manière tragique, à sa carrière. Malgré les insistances et les pleurs des corbeaux de l'AS Bantou, il ne revint jamais sur sa décision. Tel le roi Pélé qui refusa de revenir dans la sélection du Brésil pour le mondial 1974, le légendaire gardien de TV Tshipepele, AS Bantou et des Léopards, Kalala « Télévision » mit ainsi fin à sa carrière.
2. FIN DE CARRIERE TRAGIQUE: TSHISEKEDI « BELINDA» DE L'AS BANTOU
Un peu d'histoire. Avant la naissance de la ville de Mbuji-Mayi, il existait à Bakwanga quelques clubs moyens de la Miba ou des congrégations religieuses comme partout au Congo. Lors des événements de 1960, il se créa un nouveau club issu des gens de la diaspora: Luluabourg, Lubumbashi, Bukavu, Kinshasa, Likasi etc...Les « réfugiés » du Katanga et ceux de Luluabourg étaient majoritaires dans ce nouveau club, du nom de Diable Rouge. Et les mésententes ne tardèrent pas à apparaître...Les « Katangais » partirent fonder leur club à eux. C'est ainsi que naquit l'équipe d'Union Infanterie de Mbuji-Mayi, l'actuel SM Sanga Balende. Avec comme fondateurs Mrs Muela et Jonas Mukamba Kadiata Nzemba. Jusqu 'aux années 80', la langue officielle de SM Sanga Balende était le swahili...Les choses changèrent un peu avec l'arrivée des Kinois Alima, Lupeta, Tubilandu Mavungu Hébreux, Ngota, Fundu etc. Donc, le FC Diable Rouge, l'actuel AS Bantou fut constitué des « diaspora » de Kananga et Sanga Balende des « diaspora » du Katanga.
La finale de la coupe du Congo 1966 se joua entre FC Dragon de Kinshasa et le FC Diable Rouge de Mbuji-Mayi. Les Dragons de Kinshasa étaient conduits par l'intraitable Ernest Mokili Saïo. Du côté de l'AS Bantou ou FC Peuple, il y avait un joueur leader, Kabeya wa Kabamba Sotcho. Il n'était pas le seul à avoir amené son équipe en finale contre les Kinois de Dragon. Il y avait des noms comme Mulumba « Oiseau », Tshabuta « Ebouende », Mbala « Barabas », Tshimuanga « Vieux ». Mais l'AS Bantou avait deux belgicains en son sein. Deux joueurs de grand talent. Un de ce deux joueurs est connu au niveau national et l'autre, sa carrière a été brutalement stoppée...Ces deux joueurs sont: Mutshimuana et Tshisekedi « Belinda ». Tshisekedi était marié à une Belge, depuis la Belgique où il était étudiant. Mutshi ira jouer dans le FC Dragon de Kinshasa après cette finale de la coupe du Congo, remportée par le FC Dragon ou Bilima. La fin de la carrière et de la vie de Tshisekedi fit trembler tout Mbuji-Mayi...Un soir de week-end, Belinda était sorti avec des amis en boîte de nuit. A sa sortie de la discothèque pour prendre sa voiture et rentrer chez lui...il tombe sur un groupe de militaires en « patrouille »...S'il y a un domaine où nos soldats sont très compétents, c'est bien leur « patrouille » sur les civils... Le ton monte entre Tshisekedi et un des militaires. Celui-ci sort sa baïonnette et la lui enfonce dans la poitrine. Belinda meurt sur le coup. Et Mbuji-Mayi connut presque une semaine d'émeutes suite à cet assassinat. L'insécurité avec nos hommes en uniformes ne date pas d'aujourd'hui...Je peux affirmer que depuis la disparition de Belinda, l'AS Bantou de Mbuji-Mayi n'a jamais eu un avant centre de soutien capable de faire oublier ce joueur. Fin tragique identique à celle de l'immense gardien d'Ashanti Kotoko de Kumasi des années '70, Robert Mensah. Identique à celle de l'énorme avant centre de l'Etoile Filante de Lomé des années '70, Kaolo...tous morts par coups de couteau ...
3. FIN DE CARRIERE TRAGIQUE: KILASU MASAMBA « PELE »
Nous sommes vers les années 1972. Voici presque 6 ans que l'équipe de l'AS Bilima lutte pour remporter un titre de champion de Kinshasa. Ce ne sont pas les joueurs de talent qui manquent dans cette équipe, ni des hommes et de structures pouvant faire fonctionner le club. Parmi ses excellents footballeurs, Bilima compte un joueur hors pair en la personne de Kilasu Masamba. Joueur omnicompétent, capable de jouer à plusieurs postes: milieu de terrain, défenseur ou avant centre de soutien. Pour ceux qui ne se rappelle plus, Kilasu constituait, avec Mana Mambueni de Imana, le milieu de terrain des Léopards jusqu'à la coupe du monde de 1974, à Dortmund, en Allemagne. Revenons à Kilasu dit Pélé. Nous sommes en 1972 ou 1973...Les Monstres de Bilima se battent encore pour le titre de champion de Kinshasa. Et pour la enième fois, Bilima rate le coche. Mais derrière cette équipe de Bilima, il y a des hommes et des femmes qui ne ménagent aucun effort pour hisser cette équipe au rang de champion de Kinshasa. Il y a Maman Atembina, il y a Waza Gbanga, il y a surtout le président Kilandamoko...Les joueurs de Bilima avaient presque tous des voitures Mazda offertes par feu Waza Gbanga. Yamba Durango et Siampasi avaient encore les leurs jusqu'en 1980...En cette année 1973, après un échec de plus, les joueurs entamèrent une révolte stupide et inutile: « mbongo na maboko, makolo na terrain »...Les sous d'abord et ensuite on joue au foot. Intolérable pour toutes les bonnes foi qui se dépensaient pour hausser le blason « rouge et or »...Suite à ce mouvement de rébellion, le président Kilandamoko, avec l'appui de tout son comité sportif, prit une très grave décision. Tous les joueurs de Bilima furent congédiés. Il leur fut signifié de trouver de club de leur choix. Tous furent transférés sans aucune demande d'argent de Bilima, donc gratuitement. C'est ainsi que les Kabasu, Lupeta, Pala, Kilasu partirent sous d'autres cieux. D'autres revinrent demander pardon et furent maintenus. Suite à cet épisode, Kilasu masamba « Pélé » se retrouva dans Imana Matiti Mabe. Dans ce club, il évolua presque deux saisons. Mais il finit par comprendre que sa place n'était pas dans cette équipe. Une grosse mésentente s'était installée entre lui et les dirigeants de Motema Pembe de l'époque...de remords en regrets, Kilasu décida de quitter le Daring Club. Et là, commença un bras de fer inédit. Les dirigeants de Motema Pembe ne voulurent rien entendre. Il était hors de question de donner son bon de sorti à Kilasu. D'abord, les dirigeants d'Imana voulaient savoir dans quel club Kilasu voulait jouer. Et Kilasu estimait que cela ne regardait pas les dirigeants d'Imana. Il était venu dans Imana librement et il voulait quitter aussi librement...Et sur cet imbroglio, les dirigeants de Motema Pembe lui dirent que « ou il jouait pour Imana ou sa carrière était finie ». L'homme n'hésita pas une seconde. Il mit fin à sa carrière et refusa, pour toujours, de remettre les couleurs de Motema Pembe. En fait il voulait retourner dans son club d'origine, l'AS Bilima. Il trouvait malhonnête que les dirigeants de Daring puissent monayer son transfert retour chez les Dragons alors qu'il était arrivé chez les matiti mabé gratuitement. Un footballeur de génie venait de mettre fin à sa carrière de manière tragique. Footballeur de talent mais un homme d'honneur qui refusa de se soumettre...qu'est-il devenu aujourd'hui ?
CLAUDE KANGUDIE
À SUIVRE