Le parler kinois à l'épreuve des post-évolués
un commentaire vient d'être posté par muan'a mangembo sur l'article NE DIS A PERSONNE !,
Extrait du commentaire:
Le parler kinois à l'épreuve des post-évolués
Dans les années 80, mes amis et moi, réunis au sein du cercle Lisanga et Forum de la culture, nous nous sommes lancés dans un combat, presque inutile, celui de démontrer que l'on pouvait
aussi
bien parler lingala kinois, hindoubill, voire être un yanké, sans être pour autant un mauvais garçon.
En effet, il se trouve que dans beaucoup de famille notamment baluba ou swahili, parler lingala était le premier signe de délinquance. Les enfants de ces familles n'avaient droit qu'à une
langue,
en déhors de celle de leurs parents venus du Kivu, Katanga ou Kasai: le français. Pour leur parler on avait droiut qu'à cette langue. Un comportement que nous avons fini par qualifier de
post
évolués: rappelez-vous, à l'époque colonial pour avoir droit à la carte d'évolués, les familles devraient prouver qu'elles vivaient à l'européenne: manger à table et en famile et surtout
s'exprimer en français!
Cette sorte d'apartheid n'était évidemment pas de notre goût, il fallait d'une part la contrecarrer et d'autre part, démontrer qu'on pouvait tout faire avec notre parler kinois, notamment de
la
littérature, voire des débats de société. Cela commencera donc par l'organisation de disco-forum ou débat autour des chansons de nos artistes. Je me souviens de ce débat immémorable autour
de
"Bina na ngai na respect" au cours de laquelle, des mamans du quartier sont intervenus pour nous indiquer des éléments sociologiques de la danse comme la thérapie du Zebola.
Mais il fallait aller plus loin, inventer des termes pour remplacer des mots français sans équivalent lingala et puis se lancer dans la création littéraire : théâtre, poésie, nouvelles ou
romans.
Bien sûr la démarche avait ses limites puisqu'elle s'inspirait des canons de la littérature française, néanmoins, elle a donné lieu à une certaine production.
En ce qui me concerne, je mettrais la dernière main sur un recueil de nouvelles "Mokili ngrasya - Tika baseka na bango", publié 3 ans plus tard en 1990. Un exercice dont je vous livre
quelques
extraits ici, avec la nouvelle "Muan'a mama"
Mun' mama
Nazomitia n'esika na yo. kanda, mangalia na ezali na ntina. Ozali komituna ndenge nini ngai mbutamuntu na yo navandi nye. nakangi mbanga. Oz'otala kombo na ngai, lokumu ya mukubua na yo
e'kosambua. bamoleyi n'ango ntaba ya pili-pili liboso ya BMY na Ngembo. Bayuma balangue n'ango na Skol, Primus pe castel na banganda ya Kintambo, Bandal na Matonge.
tembe te, Muan'a mama, osi oningisi bayuma bakudintu po bakanga minoko na bango. Bilayi Vieux Paurret Iyoma akata yo, nayebi, nanu nesila te. Ezali na makila. Nayebi yo malamu. Eske otika
koliya
na kopasola milangi na mto ndenge Bingema alakisa yo? Nakotuna lisusu Muan'a mama, bamanganzuka na yo esengaka kaka Malia Swede to Mankenda Zekete po ekita?...
A suivre...
Muan'a mangembo.