Réaction de "Mwana Mayumbu" à propos du syndrome ...
Merci mwana Mangembo pour cette page qui me rappelle mes premiers pas à ce qui convenait d'être bien appelé Kin-la belle. En effet, venu fraîchement de Mayumbu, je débarquai à Kinshasa, bien fort d'un diplôme d'état de la section littéraire obtenu dans une des institutions des Pères Jésuites. Objectif: fac ! Mes premiers moments dans la capitale étaient jonchés de plusieurs inadaptation à ce que j'ai trouvé comme attitudes ou pratiques chez des pots trouvés sur place. Heureusement que j'avais un ami proche, Thierkas, venu trois ans plus tôt, et qui m'aidait à trouver "normales" beaucoup de choses.
La première, c'est ce que Mwana Mangembo évoque dans son récit: je ne pigeais absolument pas qu'un grand garçon de plus de 20ans soit encore dépendant de ses parents en termes élémentaires. Par exemple, qu'il a passé toute la journée sous le manguier, et vers 16 heures par là, vienne demander à sa mère ce qu'elle a préparé comme repas. Plus grave, on l'a vu s'acheter de la bière, des arachides, donner quelques billets d'argent à une "momie"qui, de passage allait au marché...Pire encore, d'autres aînés, à peine "coiffés" par un début de calvitie, n'ont jamais envisagé d'aller fonder un foyer; attendant la mort du père pour "acquérir" la parcelle....Je me plaignais par ailleurs auprès de Thierkas du fait par exemple que le matin, avec leurs brosses à dents, des pots, fraîchement réveillés, pouvaient entamer des visites chez des voisins, saluant à la main quiconque trouvé sur place.
Les kinois nous qualifiaient effectivement de "bawuta" ou "bayuma moko boye" ( des personnes peu éclairées, ignorantes des réalités de la capitale). Ils se permettaient même de nous confisquer des "momies" (petites amies) intoxiquant ces dernières que nous ne méritions pas les filles de la capitales. C'était un peu dur pour nous. Une après-midi, nous avons convoqué notre satff du quartier (nous sommes à Lemba foire), pour examiner le fondement ( bien-fondé) de cette relation d'avec nos pots trouvés sur place et qui se targuaient d'être "kinois". Ayant passé au peigne fin les raisons de leurs attitudes ( un complexe aux apparences de supériorité), très peu tenaient debout.
En effet, en dehors du fait d'être né à la capitale, d'avoir pour la plupart, des parents sur place sur qui ils pouvaient compter (eya na moyi, eya butu...), beaucoup de ces pots quand on demandait ce qu'ils faisaient dans la vie...rien du tout. Jusqu'à quel niveau ont-ils terminé leur cursus scolaire...là commençaient les hésitations et les balbutiements...
Du coup, nous réalisions petit à petit, à commencer par le nombre des "vrais kinois dans nos auditoires à la fac....,que le véritable kinois n'avait pas beaucoup de raisons pour se montrer supérieur à nous. Surtout quand on pouvait se rappeler que quand nous fûmes à l'internat au secondaire, huit sur dix ne terminaient pas trois années successives dans une même école, au motif de renvoi ou d'autres raisons sociales ou sanitaires...Au fil des années, ce complexe qui ne reposait sur pas beaucoup d'atouts, s'ébranlait petit à petit, cédant la place à d'autres types de comportements. Ces comportements ont connu des mutations (transformisme de Darwin) pour frôler un certain type de courtoisie vraiment calculée.
Du jour au lendemain, des pots commençaient à nous appeler "vieux". Le dessus des cartes: les fêtes de baptêmes et ! 1è ;res communions ont commencé à rivaliser avec les festivals de "collation de grades académiques". Sans exagérer, de Lemba à Matete, de Bandal à Basa-vubu, la plupart des cortèges académiques comptaient une écrasante majorité des "bawuta"...Quelques mois suffisaient pour que du statut de "mowuta", on basculait au statut du "fonctionnaire" d'"agent" de... Ofida, Onatra, Sofidé, Snel, d'enseignant ou d'assistant à l'enseignement supérieur, de médecin, etc.
Comme conséquence visible, les annexes autrefois assiégés par les aînés de famille, sont devenues des résidences de nouveaux citoyens, ex-"bawuta". Les anciens occupants, contraints de se reloger dans les grandes maisons. Deuxième conséquence, "cette parcelle n'est pas à vendre". A ce niveau en effet, le kinois, coincé par le "mowuta" devenu "vieux" ou "patron" ou "chef" ou carrément "préso", doit vendre la parcelle pour le "mikili" (Europe). Et, lorsque les autres enfants ou d'autres membres de la famille ont le moindre soupçon, le grand mur de la clôture ou simplement la façade avant de la maison se revêt d'une grande inscription "CETTE PARCELLE N'EST PAS A VENDRE"! ...Je vous fais grâce d'autres détails.Mais le plus intéressant, c'est qu' on a suivi le kinois en Europe, et...tout le monde est né....à kin !
"Mwana Mayumbu