Les révélations de Raoul Kidumu sur son passage dans Anderlecht
Sur le terrain, il était l’h niomme-orchestre du Daring. Il avait le destin de l’équipe entre les mains. Il s’était tellement imposé que ses coéquipiers l’appelaient « nkolo équipe » c’est-à-dire le patron de l’équipe. Il pouvait, selon Fifi Nzuzi, contester le classement de l’entraineur sans que celui-ci ne réagisse. Chez les vert-blanc, il occupait la place prépondérante qui fut celui de Joseph Kibonge dans V. Club. Il y a quelques semaines, Raoul-Albert Kidumu Mantantu est passé à l’émission "Tolobela ndembo" animée par Edo Dangi. Dans la première partie de celle-ci, il a parlé de ses débuts au football à Thysville aujourd’hui Mbanza Ngungu. L’occasion était bonne pour révéler un pan inconnu de sa carrière en annonçant avoir joué dans Anderlecht, le grand club bruxellois. Bien des connaisseurs du foot congolais ignorent ce détail important de la vie sportive de l’ancien capitaine des Léopards. Kidumu a bien été en Belgique. Son nom mérite d’être placé sur la liste des Belgicains. |
Alors qu’il joue au football dans l’ombre de son père qui est sociétaire des Diables Rouges, l’équipe de la société Otraco, Kidumu est suivi à son insu par son professeur de français de nationalité belge. Le moment venu, le prof parle au futur Léopard de son projet de l’emmener en Belgique dans le centre de formation d’Anderlecht. Les parents donnent leur accord et le jeune homme de 12 ans s’envole avec son mentor vers la métropole. Arrivé à Bruxelles, il est accueilli par les dirigeants anderlechtois. Raoul est alors placé dans un internat où il côtoie d’autres joueurs étrangers du club. A l’époque évolue dans Anderlecht un ancien de Daring Leo, Julien Kialunda. Vu son âge, Kidumu est contraint de combiner football et études.
Le jeune joue d’abord dans l’équipe scolaire d’Anderlecht pendant une année. Son évolution étant bonne, il passe chez les juniors puis dans l’équipe de réserve. Satisfait de sa progression, son entraîneur sollicite son collègue de l’équipe première afin que Raoul fasse partie de sa sélection. Son vœu est accompli et le Congolais joue pas moins de cinq rencontres amicales dans son nouveau groupe. Émerveillé par sa prestation, Julien Kialunda lui apporte son soutien indéfectible.
Au moment où la vie semble lui sourire, Kidumu tombe inopinément malade, malmené par une terrible constipation. Le traitement donné par le médecin de l’équipe ne change rien à son état de santé. Alerté par Anderlecht, le professeur de français qui a longtemps vécu au Congo conclu à l’existence d’une maladie mystérieuse qui proviendrait de la famille de Kidumu lui-même. Après concertation, les dirigeants du club décident de se séparer du joueur et de le renvoyer au Congo. Le séjour bruxellois de Kidumu se termine brusquement pourtant sur le plan sportif, rien n’est reproché au jeune homme. La belle aventure prend fin et après trois ans de prestation chez les mauve et blanc, Kidumu en pleurs rentre au bercail par un régulier de la Sabena. Son père et son oncle paternel viennent l’accueillir à l’aéroport de Ndjili. Dès sa descente d’avion se déclare aussitôt une terrible diarrhée qui va durer au moins 4 semaines. Raoul n’est pas encore au bout de ses peines.
Un samedi, alors qu’il est en conversation avec ses amis du camp Otraco venus lui rendre visite, son oncle maternel fait irruption dans la parcelle. L’arrivée impromptue de ce dernier met la mère de Kidumu dans tous ses états. Elle fond même en larmes. Imperturbable, l’intéressé va directement s’adresser au Belgicain en des termes peu amènes en présence de son père. « Diantre ! Croyais-tu que nous ne serions pas au courant de ton voyage en Europe ? Croyais-tu ainsi t’éloigner de nous ? Te voilà maintenant au pays. Nous t’avons prouvé de quoi nous sommes capables. » Emporté par une colère indicible, Kidumu qui découvre le responsable de son malheur, va chercher dans la cuisine le couteau tranchant que sa mère utilise pour couper le mfumbwa. Il veut en finir une fois pour toute avec ce sorcier qui toute honte bue s’est dévoilé au grand jour. Son père qui a compris son intention s’interpose. Il réussit même à lui arracher l’arme blanche qu’il tient derrière le dos. Le pire est évité.
Le mauvais temps étant passé, le jeune Raoul Kidumu reprend ses études secondaires à Mbanza Ngungu. Anderlecht n’est plus qu’un lointain souvenir. Suivant les conseils de son géniteur, il reprend du service chez les Diables Rouges. Il étale sur le terrain un niveau supérieur à celui de ses coéquipiers et de ses adversaires confondus. Son ombre domine le championnat local. Les échos de son talent dépassent les frontières de Mbanza Ngungu et parviennent jusqu'aux portes de la capitale. François Bila, le président de Daring, envoie des émissaires pour suivre son évolution et sa prestation au fil des matches. Dragons qui n’est pas en reste veut aussi le recruter croyant le convaincre facilement comme son père est dragonman. Ayant décidé de porter le maillot vert-blanc, il fausse compagnie aux négociateurs envoyés par les rouge or. Raoul va jouer quelques rencontres avec Daring à côté de Nsayi, Itele, Petit Puskas et du gardien Kibiasi. Avec sa forte personnalité, il réussit à s’imposer dans cette équipe comme aucun joueur avant lui. Il en devient non seulement le capitaine inamovible mais également le véritable boss. En guise de gratification, les Tupamaros transforment le prénom Raoul en Ouul. Le maestro et l’idole des imaniens a joué cinq CAN consécutives (1968, 1970, 1972, 1974, 1976), a été deux fois champion d’Afrique des nations avec les Léopards (1968, 1974), plusieurs fois champion de Kinshasa et du Zaïre avec Daring. Raoul Kidumu a porté en 1974 le brassard de capitaine de l’équipe nationale du Zaïre de football, la première sélection de l'Afrique subsaharienne à disputer la phase finale d'une Coupe du monde.
Samuel Malonga