Bellak commente la libération d'Evoloko
Merci infiniment pour cet article et les photos des anciens de Zaiko se réunissant pour célébrer la libération
d’Evoloko, il y a là quelque chose de profondément humain qu’on n’a pas l’habitude de voir chez nos artistes musiciens qui prennent plutôt plaisir à se crêper le chignon. C’est peut-être la preuve
qu’ils reconnaissent, avec moi, que c’est probablement l’artiste le plus doué de sa génération. D’ailleurs, je m’apprêtais personnellement à écrire une lettre ouverte pour demander sa libération,
sans nier l’acte abominable qu’il avait commis et pour lequel il purgeait une peine de dix ans de prison. Je savais pertinemment que cette demande pouvait paraître un peu injuste et décalée aux
yeux de certains mais je compatis toujours avec la famille de la victime à laquelle j’aurais fait beaucoup de place si j’avais écrit la lettre en question. Maintenant que la décision a été prise et
exécutée, voici
les raisons qui auraient pu motiver cette demande.
Le pays n’est plus ce qu’il était. Tout ou presque a foutu le camp. Dans le pays de Kotazo et autres chansons et animations du même acabit, de ces émissions de télévision congolaise où la palme est remise au mieux-disant impudique, ce serait trop demander aux parents que de discipliner leurs enfants selon les normes des années 60 ou 70 par exemple. A cette époque-là, c’est-à-dire l’époque de Biki de Dalienst, un garçon avait le droit de demander la main d’une fille mais à une double condition : qu’elle ne soit pas mineure et qu’elle ait fini au moins son secondaire. C’était un savoir partagé par tout le monde et les chansons, le théâtre de chez nous, surtout radiophonique, et les conversations sociales nous le rappelaient sur une base quasi quotidienne. Mais cette époque est bel et bien révolue. Il fallait s’y attendre car ces choses-là passent, pour l’essentiel, par l’éducation et celle-ci est depuis longtemps
le parent très pauvre des politiques de tous les gouvernements congolais depuis plus de deux décennies. Les enfants manquent, par voie de conséquence, l’instruction, le discernement et la capacité de rêver mieux. Quand on fait un tour à Kinshasa, on ne peut pas s’empêcher d’avoir honte, de regretter l’époque où les valeurs guidaient les agissements des uns et des autres et où il n’y avait pas encore cette ruée vers la médiocrité institutionnalisée. Le phénomène Shegué est élevé à un haut degré de normalisation sans que personne ne s’en offusque. Bref, la morale chez nous n’existe plus, elle a déjà foutu le camp et, avec elle, toute la notion de responsabilisation. Les parents et les enfants cohabitent dans une sorte de je-m’en-foutisme déconcertant. Enfermer Evoloko équivalait, à mon avis, à lui faire payer les défaillances et la démission de toute une société, celle-là même qui procède depuis longtemps
par le nivellement par le bas à chaque étape de l’existence. On ne peut pas espérer que l’incarcération médiatisée d’un artiste éduque, à elle seule, la mentalité de ces enfants dont on nie le droit fondamental d’aller à l’école.
Il fallait le libérer. Mais la façon dont cette libération a été mise en scène, théâtralisée et instrumentalisée m’a fait sortir de mes gonds. Même si je la voulais, j’aurais souhaité qu’elle se fasse de manière discrète pour deux raisons. D’abord, l’impression donnée était que cette sortie de prison de l’artiste devait s’accompagner d’une humiliation devant caméras, pour jeter aux chiens ce qui lui restait d’honneur. C’était réussi. Il s’était confondu en excuses, remerciant ipso facto n’importe quel nom qui lui passait par la tête. Il aurait même pu remercier son chien qu’il ne s’en serait même pas rendu compte, tellement cette interview à chaud était d’une loufoquerie ! Ensuite, et c’est plus important, l’acte posé était extrêmement grave et la marche triomphale (voir You Tube) dans une Hummer au toit ouvrant avait quelque chose d’indécent et de contre-productif. Je m’étais mis
pendant une minute à la place de la famille de la victime, une seule minute avait suffi pour que j’aie la nausée. Tous ces gens, Werrason en tête, qui se pavanaient à côté du libéré pour célébrer je ne savais quoi, n’avaient, à mon avis, rien compris à ce que doit être notre rôle sur terre, aux raisons profondes pour lesquelles le Congo était devenu à ce point malade. Rien, et c’est extrêmement triste.
Bellak
les raisons qui auraient pu motiver cette demande.
Le pays n’est plus ce qu’il était. Tout ou presque a foutu le camp. Dans le pays de Kotazo et autres chansons et animations du même acabit, de ces émissions de télévision congolaise où la palme est remise au mieux-disant impudique, ce serait trop demander aux parents que de discipliner leurs enfants selon les normes des années 60 ou 70 par exemple. A cette époque-là, c’est-à-dire l’époque de Biki de Dalienst, un garçon avait le droit de demander la main d’une fille mais à une double condition : qu’elle ne soit pas mineure et qu’elle ait fini au moins son secondaire. C’était un savoir partagé par tout le monde et les chansons, le théâtre de chez nous, surtout radiophonique, et les conversations sociales nous le rappelaient sur une base quasi quotidienne. Mais cette époque est bel et bien révolue. Il fallait s’y attendre car ces choses-là passent, pour l’essentiel, par l’éducation et celle-ci est depuis longtemps
le parent très pauvre des politiques de tous les gouvernements congolais depuis plus de deux décennies. Les enfants manquent, par voie de conséquence, l’instruction, le discernement et la capacité de rêver mieux. Quand on fait un tour à Kinshasa, on ne peut pas s’empêcher d’avoir honte, de regretter l’époque où les valeurs guidaient les agissements des uns et des autres et où il n’y avait pas encore cette ruée vers la médiocrité institutionnalisée. Le phénomène Shegué est élevé à un haut degré de normalisation sans que personne ne s’en offusque. Bref, la morale chez nous n’existe plus, elle a déjà foutu le camp et, avec elle, toute la notion de responsabilisation. Les parents et les enfants cohabitent dans une sorte de je-m’en-foutisme déconcertant. Enfermer Evoloko équivalait, à mon avis, à lui faire payer les défaillances et la démission de toute une société, celle-là même qui procède depuis longtemps
par le nivellement par le bas à chaque étape de l’existence. On ne peut pas espérer que l’incarcération médiatisée d’un artiste éduque, à elle seule, la mentalité de ces enfants dont on nie le droit fondamental d’aller à l’école.
Il fallait le libérer. Mais la façon dont cette libération a été mise en scène, théâtralisée et instrumentalisée m’a fait sortir de mes gonds. Même si je la voulais, j’aurais souhaité qu’elle se fasse de manière discrète pour deux raisons. D’abord, l’impression donnée était que cette sortie de prison de l’artiste devait s’accompagner d’une humiliation devant caméras, pour jeter aux chiens ce qui lui restait d’honneur. C’était réussi. Il s’était confondu en excuses, remerciant ipso facto n’importe quel nom qui lui passait par la tête. Il aurait même pu remercier son chien qu’il ne s’en serait même pas rendu compte, tellement cette interview à chaud était d’une loufoquerie ! Ensuite, et c’est plus important, l’acte posé était extrêmement grave et la marche triomphale (voir You Tube) dans une Hummer au toit ouvrant avait quelque chose d’indécent et de contre-productif. Je m’étais mis
pendant une minute à la place de la famille de la victime, une seule minute avait suffi pour que j’aie la nausée. Tous ces gens, Werrason en tête, qui se pavanaient à côté du libéré pour célébrer je ne savais quoi, n’avaient, à mon avis, rien compris à ce que doit être notre rôle sur terre, aux raisons profondes pour lesquelles le Congo était devenu à ce point malade. Rien, et c’est extrêmement triste.
Bellak
Cher Mbokatier Bellak,
je reviens sur votre revolte justifiée pour toute personne sensée être en possession d'un cerveau et qui prend le temps de refléchir; sauf que les acteurs de cette mise en scène n'ont pas pris la mésure de l'impact négatif que causerait leur acte. Sont-ils excusables en soi? ho que si!
Primo: le devenir d'une fille pour notre société est de procréer. Même pas le mariage qui vient après. Une fille n'a de l'avenir et n'est prise en considération qu'après avoir prouvé sa capacité à traverser les deux épreuves. Raison pour laquelle l'histoire sociétale nous apprendra qu'une fille est mariée dès sa naissance. Ce qui était illustré par une cérémonie culturelle en plantant symboliquement une lance dans la parcelle des parents de la fille et en prononçant des paroles liant la fille à son
futur époux.
Secundo: l'Africain a le pied dans le 3è millénaire mais la tête à l'âge de pièrre. Nous tendons souvent à copier les lois occidentales tout en restant barbares dans l'acte. Il est vrai que ce genre de rapports intimes n'est pas à encourager, ce type de relations est à dénoncer. Mais que reste à faire pour ne pas franchir le rubicon? quel change pour nos jeunes filles qui ne sont pas à l'abri d'un professeur indélicat dans leur milieu scolaire par des notes sexuellement transmissibles? face aux parents désarmés, impuissants et souvent complices. La seule arme est la moralisation des masses.
Tertio: en créant un précédant, la justice congolaise vient d'ouvrir une brêche où vont s'engouffrer les justiciables. Jurisprudence oblige. Je me demande même si le ministre qui, j'en suis convaincu, en prenant sa décision n'a pas voulu adresser un geste politique discret vers une frange de la population. Que dit le Pésident?
Quatro: Ah! il est loin le temps de la conscientisation des jeunes filles par ce même Evoloko Antho Nickel. Position ya ba vieux, position ya ba mpaka. Quelle réplique vont utiliser les jeunes filles maintenant? puisque le pourfendeur d'ONASSIS s'est brûlé les ailes.
MANU LILO