Sarkozy et la RDC
Kinshasa, 20/01/2009 / Politique
Les dernières et controversées déclarations du président français Nicolas Sarkozy sur l’exploitation à envisager des richesses de l’Est de la RDC par le Rwanda ont soulevé de virulentes réactions à Kinshasa au point d’amener le chef de la diplomatie congolaise à exiger des éclaircissements par son représentant diplomatique.
Le ministre des Affaires étrangères de la République Démocratique du Congo, Alexis Thambwe Mwamba a déclaré lundi devant La presse « qu’il n’est pas question de changer les frontières congolaises et de déverser la population rwandaise en RDC ». Le ministre congolais réagissait à la suite de la Convocation de l’ambassadeur de France en RDC, Pierre Jacques mot pour n’avoir des explications à propos du contenu du discours du Président Nicolas Sarkozy sur la situation dans les Grands Lacs au corps diplomatique.
Le chef de la diplomatie congolaise a souligné que les explications fournies au gouvernement par l’ambassadeur de France
en RDC démontrent clairement que ce n’est pas du tout cela et que la France respecte l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation entre la RDC et ses voisins en général et le Rwanda
en particulier.
Les déclarations du Président français s’inscrivent dans la recherche des voies de sortie de la crise dans l’Est de la RDC , a-t-il précisé. La République Démocratique du Congo et le Rwanda
s’activent à normaliser leurs relations et à développer leur coopération bilatérale avec le lancement prochain des activités de la CEPGL (Communauté économique des pays des Grands Lacs), a
souligné M. Thambwe. Selon lui, l’ambassadeur de France, Pierre Jacquemont a remis au gouvernement une aide mémoire qui donne la réponse la plus évidente pour briser les bases de l’économie de
guerre en vue de forcer le retour à la paix et que la mise en valeur de la région des Grands Lacs doit se faire sur la base d’une coopération régionale.
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L’ambassadeur de France en RDC, Pierre Jacquemont, a qualifié de « mauvaise interprétation » l’initiative du Président de la République française pour sortir de la crise
endémique dans l’Est de la RDC , à l’occasion des vœux du corps diplomatique sur la situation dans les Grands Lacs. Le diplomate français a fait cette déclaration lundi, à l’issue de l’audience
que le ministre des Affaires étrangères, Alexis Thambwe Mwamba lui a accordée pour avoir des explications sur la récente déclaration du Président Nicolas Sarkozy portant sur la situation
dans la région des Grands Lacs.
M. Pierre Jacquemont a souligné qu’il a remis au ministre Alexis Thambwe Mwamba une aide mémoire qui prend la déclaration du Président français comme une contribution à la paix durable dans l’Est
de la RDC , dans le cadre d’un renforcement des liens d’amitié entre la France et la République Démocratique du Congo qui sera au centre de la prochaine visite du Chef de l’Etat français, en mars
prochain à Kinshasa. Il a souligné qu’il était temps de lever immédiatement le malentendu, la mauvaise lecture au lendemain de la déclaration du Président français lors des vœux au corps
diplomatique.
Selon l’ambassadeur de France en RDC, il faut s’attaquer aux causes fondamentales de la guerre endémique au Congo dont
la surpopulation des uns, les richesses des autres ont généré des « convoitises », débouchant sur des conflits. Après 1994, a-t-il indiqué, l’exploitation frauduleuse des ressources
minérales (coltan, tungstène, or, et à un moindre degré le cobalt, les rubis et les pierres semi-précieuses) s’est développée, associée à une forte demande mondiale. L’exploitation du charbon de
bois, de bois tropicaux, de viande, de thé et la papaïne constituent des ressources d’appoint, a fait savoir le diplomate français.
Pierre Jacquemont a estimé que l’Est de la RDC , la région au coeur de tous les conflits, est devenu zone de non droit, depuis que l’exploitation et le commerce frauduleux se sont installés à
grande échelle, créant une économie militarisée où les chefs de guerre s’associent aux hommes d’affaires pour exporter les minerais sur les marchés porteurs. Cette économie militarisée se
fait au détriment de la population. Elle est exportée par des réseaux maffieux dont la réalité existe depuis 1994. La guerre se nourrit de la fraude, a précisé l’ambassadeur de France. L’une des
solutions que compte proposer la France : il faut briser cette économie de guerre qui génère à la fois la violence, le pillage, le travail humain dans les mines et les déplacements massifs
des populations et qui n’apporte rien à la RDC.
La France respectera l’intangibilité des frontières de la RDC et qu’il n’y aura pas de « Kosovo » dans les Grands Lacs, les communautés devant coexister dans leur diversité, les haines
devant s’éteindre et le développement de la région n’étant pas compatible avec la poursuite d’une économie frauduleuse. Il a plutôt préconisé de pousser les pays de la région d’aller vers une
intégration économique qui prend en compte les besoins identiques en énergie, en biens alimentaires en infrastructures, en investissements sociaux (santé, éducation, logements sociaux). La France
a lancé un appel à la MONUC dans son nouveau mandat, à l’ONU et l’OCDE (Organisation pour la coopération et le développement en Europe) d’exercer une pression internationale pour agir contre
cette économie illicite et pour couper les vivres aux seigneurs de la guerre en « moralisant » l’activité des multinationales a-t-il dit.
(TH/GW/PKF)
ACP