Au Congo-Kinshasa, ex- Zaïre De l’opposition au pouvoir ou le fossé entre parler et faire
Au Congo-Kinshasa, ex- Zaïre
De l’opposition au pouvoir
ou
le fossé entre parler et faire
Par C. Kim
Au lendemain du discours du 24 avril 1990 du Président Mobutu au cours duquel il annonçait la fin du monopartisme au Zaïre, la parole s’était libérée pour un bon nombre des Zaïrois de l’époque. S’attaquer au Président était devenu une sorte d’excitation de simple fait que durant près de 25 ans, on avait passé plus de temps à le glorifier ou à l’adorer. Pour bien s’illustrer, il fallait avoir un discours capable de bien diaboliser le Maréchal du Zaïre. Parfois, il était préférable de se victimiser pour s’attirer la sympathie du peuple. Au point que, même après le départ de Mobutu du pouvoir, certains politiciens ne se sont pas privés de recourir à cette technique de diabolisation de l’autre ou de victimisation pour assouvir leur appétit glouton d’accéder à l’exercice du pouvoir. Et le peuple qui semblait s’émerveiller d’entendre ces discours ne pouvait que constater le fossé existant entre les promesses et critiques de jadis par rapport à l’amélioration de leur vécu quotidien.
Des slogans à la place du travail
Si les slogans pouvaient changer les choses, le Congo-Kinshasa aurait connu déjà son développement à l‘époque du Zaïre. Slogan et travail sont deux choses différentes. La génération d’avant 1960 avait le mot “Indépendance” comme synonyme du bonheur après le départ de l’homme blanc. Tandis que celle d’après 1965 croyait que “MPR égale servir ; mais se servir, non” rimait à l’Etat de servir d’abord son peuple. Et pourtant, les dirigeants de l’époque volaient les deniers publics sans se soucier du peuple. Aussi, les “Libérateurs” venus en botte de caoutchouc sont devenus des milliardaires en se libérant peut-être de leur propre pauvreté.
Ces faits ont été vécus en spectateurs par certains ; mais cependant il y a d’autres qui n’avaient pas fermé leur bouche pour les critiquer. Ils dénonçaient souvent sans pour autant proposer des pistes de solution tout en faisant miroiter le bonheur au peuple. Ils faisaient croire que tout sera bien avec eux au pouvoir. Les esprits avertis savaient que tous les politiciens Congolais (Presque tous, par politesse) sont les mêmes. De son côté le peuple continue à rêver et à répéter des slogans. Lors de la prestation de serment du Président Felix Tshisekedi, le peuple avait cru bien faire en scandant : “ Felix, kobosana te ; Papa alobaki, le peuple d’abord” (Felix [Tshisekedi] n’oublie pas, Papa {Etienne Tshisekedi Wa Mulumba, père de l’actuel président] avait dit le peuple d’abord). C’est comme si le peuple ne connaissait pas le programme du Président élu mais il se forçait de lui coller la vision de son géniteur.
Le peuple d’abord
Un slogan qui n’a de sens que dans les intentions pour ceux qui le répètent comme des automates. Dans les faits, c’est le jour et la nuit. Le pauvre combattant croyait qu’il va être le premier bénéficiaire de ce régime. Un bon nombre parmi eux vit la grande désillusion. Entre-temps, venus pour la plupart de l’extérieur du pays, les “Bana mayi ya Président” (les amis du President) s’illustrent en Princes de Zamunda. On les voit se métamorphoser physiquement et d’étaler de manière ostentatoire et arrogante un luxueux train de vie. Or souvent, on sait que ce sont ceux qui quittent L’Enfer” congolais pour l’extérieur qui changent leur aspect physique.
N’essaye pas de leur faire remarquer que leur discours durant l’opposition contraste avec ce qu’ils font au pouvoir. Comme ils ont les secrets des slogans, ils vous diront “ Maboko pembe” pendant qu’eux, ils sont en train de voler ; de connaitre de dépassement budgétaire spectaculaire à trois zéros ; souvent l’argent décaissé au niveau du Trésor public ne reflète pas les travaux exécutés sur terrain comme à l’époque de Mobutu ou Kabila. Ceux qui essayent de leur donner des leçons de morale, entendent un autre slogan magique : “Etat de droit”. Une justice sélective dont les agissements commencent à permettre même à ceux qui, hier, violaient impunément la loi de donner de la voix pour la critiquer. Un Kabange Numbi ou la femme de l’ex-Président qui parlent de la justice, qui pouvait y croire ?
Pendant ce temps-là, le peuple refuse de voir la réalité qui est devant lui. Il continue de croire être sur le bon chemin grâce aux multiples promesses. Dans sa chanson « Journaliste en danger », le chanteur Ivoirien Alpha Blondy avait raison de dire :” Les gouvernants font la pluie et le beau temps. Le peuple meurtri fait semblant d’être content”. Et pourtant, c’est le peuple qui pouvait faire bouger les choses se complaint dans la distraction.
Distraction au pays de la manipulation des masses
Lors d’une interview quelques années après la chute du régime Mobutu, son ancien Directeur de cabinet le professeur Vunduawe Tepe Manko répondant à la question si Mobutu pouvait gagner les élections face à l’opposition conduit par Etienne Tshisekedi. Sa réponse fut affirmative tout en précisant ceci : ”Mobutu avait l’argent et connaissait ce peuple”. Certains s’accorderaient même avec Boketshu wa Yambo en disant : “ Oyo peuple ya lolenge nini” (Quel genre de peuple !).
Malgré les faits vécus sous Mobutu ou Kabila, le peuple assiste en spectateur face aux agissements des donneurs de leçon d’hier. Il regarde sans broncher au manqué d’eau, de l’électricité, au délabrement des routes. Mais il est prêt à donner de la voix quand il s’agit “de père et de mère” (Loi propose par un député de réserver certaines fonctions aux seuls Congolais nés de père et de mère), ou encore “500$” une autre proposition de loi fixant le montant maximum de la dot a 500$ américains. On s’interroge sur la nécessité des telles lois en cette période. Le peuple pouvait demander aux dirigeants actuels de concrétiser leurs promesses ou d’améliorer les choses par rapport aux régimes passés. Actuellement pour encore mieux endormir le peuple, on applique une autre technique de manipulation des masses, celle du leader communiste russe Vladimir Ilitch Oulianov, dit Lénine: “Dites-leur ce qu’ils ont envie d’entendre”. En ce temps, les Congolais se voient envahir par des émissions politiques avec débats des journalistes-politiciens ; ils se consolent d’écouter des dénonciations faites par Inspection Générale des Finances “IGF” mais sur le fond, rien ne vient changer son vécu quotidien. On voit des gros poissons en train de circuler librement malgré d’énormes soupçons de vol des deniers publics. Pour justifier l’inaction de les mettre hors d’état de nuire, un autre slogan est à la mode : “Laisse la justice faire son travail”. Si hier on dénonçait l’incompétence ou la mégestion des autres ; une fois au pouvoir, on a des excuses.
Le mal, c’est l’autre
C’est facile de regarder une quelconque compétition en étant assis dans les tribunes. La critique est aisée mais l’art est parfois difficile. Peu importe la profondeur du mal mais quand on a la volonté de changer les choses, cela ne dure pas. On commence par balayer devant sa portée n premier. Si le souci de l’intérêt général était le vrai leitmotiv, après l’éclatement de la coalition FCC-Cash, on aurait vu les choses s’améliorer. Les Congolais vivent dans un pays où lui-même le Président ne connait pas son propre salaire. Ce dernier peut aller signer des accords internationaux dont le contenu reste mystérieux. On est incapable de relancer le Parc Agro Industriel de Bukanga Lonzo mais on est capable de donner le site aux Canadiens sulfureux pour y produire du chanvre (Bangi, nua, diamba…). On prend des décisions et on les annonce comme si c’était encore à l’époque des meetings de Mobutu à Kinkole. Qui, parfois pris par un coup de tête, pouvait dire : “ Banda lelo, lipa ezalaki 2 zaïres, ekomi 1 zaïre” (A partir d’aujourd’hui, le pain qui coûtait 2 zaïres devient au prix de 1 zaïre). Tout cela sans mesure économique d’accompagnement. Il n’est pas étonnant que plusieurs Congolais ne croient plus que c’est Kabila ou Katumbi qui empêchent le gouvernement de faire exécuter ses propres décisions quant à la fermeture des ports privés ou la baisse de prix des denrées alimentaires de premières nécessités.
On oublie vite
L’ivresse du pouvoir interdit aux gens de voir le mal qu’ils sont en train de commettre. L’arrogance ne leur permet pas de recadrer le tir. Pince-sans-rire, certains défenseurs du pouvoir se permettent de passer sur les plateaux de télévision brandissant les théories de Machiavel pour conserver le pouvoir. Si cela marchait, le clan Mobutu serait encore au pouvoir. Les diagnostics de l’Eglise catholique sont devenus amers à les entendre. Et pourtant hier, on s’en servait pour fustiger les régimes précédents. Quant aux parrains des chancelleries occidentales, on ose même à les qualifier des impérialistes. Ceux-là qui faisaient hier le relais de leur discours.
Le peuple espérait voir un changement “Aradjical”. Dans l’euphorie de la célébration de la Victoire aux élections de 2018, on avait entendu de la bouche d’un dirigeant du parti présidentiel de dire : “Soki mutu aboyi FCC, azali ndoki.” Hier le FCC était l’incompétent. Hier encore, on était devenu ami avec le FCC sans que personne crie à la trahison. Aujourd’hui, on compose l’Union sacrée avec les mêmes membres du FCC.
Certains disent que ceux qui s'assemblent, se ….
C.KIM