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Publié par SIMBA NDAYE

OLIVER N’GOMA, ROI DE L’AFROZOUK : 10 ANS DÉJÀ…

Au Gabon, en matière de musique, il y’a d’abord l’intouchable, l’intellectuel Pierre Akendéngué. De lui, tout a été dit ou presque. Aujourd’hui à 77 ans, le patriarche a entamé un ultime combat : l’écologie et la préservation de la nature, particulièrement foisonnante dans ce pays.

Ensuite, il y’a toute une myriade d’artistes parmi lesquels Mackjoss ou Hilarion Nguema (Quand la femme se fâche) ou encore l’iconoclaste Patience Dabany, anciennement Marie-Joséphine Kama. Avec un parcours totalement atypique d’ancienne première dame du Gabon à chanteuse à succès (On vous connait).

Et beaucoup d’autres encore (Angèle Assélé, Annie-Flore Batchiellilys, Pamela Bodjogo, Queen Koumb, J-Rio, Arielle T. ou Hermy Mabila et j’en oublie forcément. S’y déploient également plusieurs groupes musicaux parmi lesquels ‘’Les Diablotins’’.

Venant de Kinshasa où il avait longtemps évolué dans l’Afrisa aux côtés de Seigneur Ley, le Centrafricain Malao Hennecy fracasse les scènes librevilloise et africaine en 1982 avec un tube d’anthologie ‘’Associé’’, repris par bien d’autres chanteurs à travers le monde.

Si tous ces artistes sont femmes et hommes de grands talents, n’ayons pas peur de l’affirmer, il n’y a eu et il n’y aura qu’un seul Oliver N’Goma. Et pour bien comprendre le phénomène, il convient de remonter au milieu des années ’80.

Dans le but, selon les propres termes de ses membres, de ‘’retourner à leurs racines’’, le mythique groupe Kassav effectue une tournée triomphale dans différentes capitales africaines. De Luanda à Niamey, de Bangui à Abidjan, de Lomé à Praia, de Libreville à Ouaga, le groupe antillais remplit les stades et électrise les foules, avec un style musical nouveau sur le continent, le Zouk.

Nouveau ? Pas tant que çà puisque Jacob Desvarieux lui-même, l’un de ses leaders, guitariste et chanteur, affirme que Kassav s’inspire de rythmes africains. Il n’en fallait pas plus pour engendrer son clone africain. Le mariage entre le son des Caraïbes et celui du continent était évident lorsque l’on connait par exemple l’importance de la musique cubaine dans la naissance de la rumba congolaise. L’Afrozouk était né.

En 1989, il sera porté au firmament par l’Ivoirienne Monique Séka, surnommée la ‘’Reine de l’Afrozouk’’ avec ‘’Missounwa’’, tube devenu planétaire. Au Gabon, Oliver N’Goma en sera le Roi incontesté.

Olivier N’Goma (de son vrai prénom, son nom signifiant Tam-Tam en Kikongo), nait le 23 mars 1959 à Mayumba dans le sud-ouest du Gabon, région adossée à l’ancien royaume Kongo. Le futur Oliver, qui a 26 ans à l’époque de la tournée de Kassav et qui exerce comme cameraman à la RTG2 (mais dont la musique constitue la véritable passion), est subjugué.

En 1988, il part en formation en France. Et c’est donc à Paris qu’il fait LA rencontre décisive : Manu Lima, le célèbre producteur et arrangeur cap-verdien, qui a déjà à son tableau de chasse de grands noms de la musique africaine (Pépé Kallé et Ismaël Lo entre autres).

Lima est séduit par la maquette que lui présente le jeune Gabonais. Il lui fait signer un contrat chez Lusafrica, la maison de disques de la grande Césaria Evora.

Lorsque Oliver N’Goma sort l’album ‘’Bané ’’ en 1990, c’est un séisme au Gabon et dans toute l’Afrique. Le Cotton Club, célèbre discothèque de Libreville, passait le titre éponyme une dizaine de fois par soirée.

Les radios et télés (Africa N°1, BBC, RFI (avec le regretté Gilles Obringer dans ‘’Canal Tropical’’, l’ancêtre de ‘’Couleurs Tropicales’’ de Claudy Siar) en ont usé et abusé. Les discothèques de Paris, Bruxelles, Genève, Londres, New York, Pointe-à-Pitre en Guadeloupe ou Kingston en Jamaïque saoulaient les ambiançeurs à longueur de nuit. L’Amérique latine a embrayé. Dans toute l’Afrique (vraiment toute), pas une soirée dansante, pas un seul anniversaire, pas un seul mariage, pas la moindre fête sans Bané.

Dans les Antilles et dans toutes les Caraïbes, ‘’ce retour d’Afrique’’ a été extraordinairement bien perçu, comme un pont, une passerelle vers ‘’la Terre des Ancêtres’’.

Il faut dire que tout était réuni pour en faire un must. La voix langoureuse d’Oliver N’Goma, comme une complainte alliée à ce zouk cuisinée à la sauce africaine, séduit à travers tout le continent et dans les îles de l’océan indien.

Qu’importe la langue dans laquelle il chantait (le Lumbu, mâtiné d’un peu de mpunu et de Kikongo), l’effet est immédiat. Dans la chanson, l’artiste exhorte les jeunes à faire des études et à travailler dur car ‘’seul le travail paie’’. Les publics gabonais, africain et ceux de l’immense diaspora sont sous le charme.

La chanson Bané a tellement bien marché qu’il a relégué au second plan Icole, un autre titre tiré du même album mais presque de la même facture. Du jour au lendemain, Oliver N’Goma est propulsé tout en haut des hit-parades. Cet album demeure à ce jour l’une des plus grosses ventes d’un opus africain de ces 30 dernières années. N’Goma devient le Roi de l’Afrozouk.

Fort du statut de star nouvellement acquis, il fait une nouvelle fois appel à Manu Lima pour un second opus qui sort en 1995, Adia. Suivront Seva en 2001, puis Saga en 2006.

Puis, sans que l’on comprenne bien pourquoi, "Noli" (c’était son surnom) délaisse peu à peu sa carrière musicale alors qu’il est au sommet de la gloire. Il renoue avec ses premières amours et devient directeur des programmes de la télévision gabonaise.

Au Gabon même, le cinéaste René Sousatte réalise un portrait-documentaire "Oliver N'Goma le crooner" tandis que Sylvain Nzamba sort un livre "Olivier N'Goma, artiste sentimental et moraliste".

Talonné par plusieurs producteurs, l’artiste s’apprêtait, semble-t-il, à reprendre le chemin des studios. Il n'en aura pas le temps.

 

Le 7 juin 2010 (il y’a 10 ans jour pour jour) Oliver N’Goma décède des suites d’une insuffisance rénale à l’hôpital d’instruction des armées de Libreville, après y avoir transporté d’urgence. Il avait 51 ans.

Le Gabon et l’Afrique perdaient ce jour-là le Roi de l’Afrozouk et un immense chanteur. Mais pour ses fans et pour les mélomanes, nombreux à travers le monde, ses œuvres lui survivront. Et c’est l’essentiel.

Salut et merci l’artiste.

SIMBA NDAYE

 

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P
N'oublions pas que Franco est mort à 51 ans. J'ai toujours eu l'impression qu'il avait tellement vécu, composé et chanté qu'il pouvait aller se reposer un peu plus tôt.
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T
Bonjour,<br /> Juste vous remercier pour ce témoignage. j'ai toujours aimé les chansons de ce baobab qu'est le frère Oliver N'Goma qu'il a plut au Seigneur de rappeler trop tôt. De Dédougou capitale de la région de la Boucle du Mouhoun à Banfora capitale de la région des Cascades au Burkina Faso, nous n'oublierons jamais notre frère bien aimé. Qu'il repose en paix.<br /> Tony
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N
Bonjour,<br /> Je suis impressionnée. Tout est juste. Merci pour ce témoignage. Je suis du Gabon et Noli était notre idole. Il a fait connaître mon pays en Afrique et dans le monde et çà, nous ne l'oublierons jamais. Le Gabon et l'Afrique sont fiers de lui.<br /> Merci encore.
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