Le boléro, une danse et un style musical
Le boléro, une danse et un style musical
Selon le dictionnaire Larousse, boléro est un mot espagnol qui veut dire danseur ou air de danse de bola, la boule. Éparpillé dans le monde hispanique, de l’Espagne au Mexique, en passant par Porto-Rico et Cuba, ce rythme a fini par atterrir au Congo. Comme la rumba, la version congolaise est proche de la variante cubaine.
Avalé par son aînée la rumba, on ne trouve presque pas les traces de son existence dans les livres consacrés à la musique congolaise. Certains tendent même à confondre la rumba et le boléro. Et pourtant, ce sont deux rythmes différents tant par la structure de leur style que par l’apparence de leur cadence, deux danses non identiques. La valse bolérienne est suave ; le pas est lent, assuré ; le tempo est plus doux et beaucoup plus romantique. L’expression musicale est surtout caractérisée par une singularité : la mise en relief de la trompette. Elle émerge dans le firmament des sons produits par les instruments pour magnifier la mélodie.
La rumba a connu plusieurs versions dont celle dite odemba de l’OK Jazz. Elle a donné naissance à plusieurs danses qui se différencient les unes des autres. Le boléro, lui, est resté presque le même. Il se danse de la même façon et n’a pas vraiment connu de diversité ou de diversification. Il a gardé jalousement son originalité.
Le boléro a connu son apogée avant l’indépendance et s’est allégrement poursuivi jusque dans les années 70. Pendant une bonne vingtaine d’années, il a inspiré plusieurs artistes-musiciens. Des titres dignes d’anthologie avec des phrasés pleins de poésie ont animé plusieurs mariages. Il a fait l’affaire des "déploiements" avec les filles d’honneur pour accompagner les jeunes mariées vers leurs époux. Ces classiques de la musique congolaise moderne ont pour titres Oyangani ngai (Franco), Liwa ya Wetsh (Franco), Maria Maria (Rochereau), Oyo nde zoba (Edo Nganga), Regina Régina (Lutumba), Joujou Zena (Rochereau), Conseil d’ami (Vicky Longomba), Gégé yoka (Lutumba), Zowa (Mario Matadidi), Kinsiona (Luambo). Pendant toutes ces années, l’OK Jazz a été un grand pourvoyeur de boléro.
Les années 80 sonnent le glas de ce style musical. L’unique composition de cette décennie émane de Luambo. L’artiste s’éclate lors d’un show télévisé. Dans une colère proche de l’hystérie, Grand-Maître s’en prend à ses détracteurs dans Kinshasa mboka ya makambo au studio Mama Angebi. Ce pamphlet clôture l’ère bolérienne commencée dans les années 50, car ce titre semble être le dernier boléro de la musique congolaise.
Englouti par de nouveaux rythmes, le boléro tombe en désuétude et disparaît du paysage culturel congolais. Pour retrouver aujourd’hui ses traces, il faut remonter dans le temps, fouiller dans les souvenirs et plonger dans les mélodies du passé, surtout celles des sixties.
Samuel Malonga