De la noblesse du terme BMW collé aux congolais.
De la noblesse du terme BMW collé aux congolais.
Pourquoi dans les pays de l’Afrique de l’Est, désigne-t-on les congolais avec ces trois initiales « BMW » m’a apostrophé dernièrement à Kinshasa un « mapeka », parce que s’est-il empressé d’ajouter : « Vous les kinois, avec votre paresse légendaire, vous avez donné du congolais l’image de jouisseur ». Cette affirmation bien que fausse, est celle que les congolais véhiculent d’eux même, parce que justement, le kinois ou congolais est travailleur. Et dans ces pays d’Afrique de l’Est, les congolais l’ont, à maintes reprises prouvés. Ils n’ont jamais eu peur de petits métiers – pousse pousseur, cordonniers, maçons, ajusteurs ou menuisiers, l’artisanat dans beaucoup de pays africains est le monopôle des congolais exilés, qui y gagnent honnêtement leur vie.
D’où vient donc cette réputation du congolais amateur de Bière (Beer), Argent (Money) et de
femmes (Women) qui nous a collé pendant longtemps à la peau ? La réponse est dans le répertoire musical congolais en général, très prisé en Afrique anglophone et aux traducteurs du
lingala en anglais, trop paresseux, pour expliquer aux autochtones les subtilités de l’une des plus belles langues africaines.
En effet, c’est dans l’introduction d’une chanson vantant les mérites du travail signé Tabu Ley dans les années 80 que paradoxalement, on est allé chercher ce terme BMW pour « traiter les congolais de paresseux et de jouisseur ». Quelle ironie !
Mofuku na libenga
« Kopo na loboko – lisolo na monoko
Moziki pembeni – mofuku na libenga »
Ainsi commence la chanson « Kilo ya mobali présence na mosala
( ?)» de Tabu Ley, pour inciter le congolais à travailler pour gagner sa vie, accéder à son indépendance, en tant qu’homme.
Tongo etani, ngonga ebeti
Nakeyi mosala na pokua nakozonga
Sanza esila boye, libenga litondi
Kilo ya mobali présence na mosala
Mosolo nazui na kosala mofuku
Ndambo po na ndako ya mama na bana
Ndambo po ya kopo nabombi na soseti
Kinshasa elingaka bisengo ya koleka
Kopo na loboko, lisolo na monoko
Moziki pembeni mofuku na libenga.
Voilà la teneur exacte de cette chanson qui nous a valu la réputation de paresseux ! une chanson qui vante le travail honnête. Pourtant, lorsque les Est africains en demandaient la traduction, on se limitait a la traduction de son introduction – Un verre à la main pour la conversation, de l’argent dans ma poche pour les belles femmes (a drague) « Bière, argent, femmes » - Une triptyque qui n’est possible, continue Tabu Ley, que si on se lève chaque matin pour aller travailler. L’argent et les femmes n’étant que la récompense du dure labeur accompli pendant tout un mois.
Voilà le style de vie que Tabu Ley promettait au congolais en général et au kinois en particulier, qui a le courage de se lever chaque matin pour aller travailler. Quant aux restes des congolais de l’intérieur, ils peuvent aussi accéder à ce bonheur, à travers le travail de la terre, souligne Tabu Ley dans son refrain :
« Zairois kona bilanga
Yeye Sala bilanga ah »
Et dire que, par la faute de nos traducteurs, les Anglophones n’auront pas compris que le Kinois qui peut s’offrir sa bière, avoir de l’argent dans sa poche et même draguer toutes les femmes qu’il veut est celui qui travaille : « se lève tôt, pour ne rentrer que le soir ». Et son argent, est le fruit de son labeur, un salaire qu’il prend soin de bien partager entre son foyer – Mama pe bana – et son plaisir !
On devrait finalement être fier de ce terme BMW, plutôt que de s’en offusquer. Et il serait temps que vis-à-vis de nos amis anglophone et Est africains, qu’on leur donne la traduction intégrale de cette chanson de Rochereau. Ils en auront besoin un jour, s’ils n’ont pas encore compris comment le congolais flambe !
Joseph Pululu