Lorsque Boma était la capitale du Congo
Située à 125 km de Matadi et à 470 km de Kinshasa, la ville de Boma cache parfois mal son histoire d’ancienne station d’esclaves et de siège du pouvoir léopoldien d’abord puis colonial ensuite. Fondée par les marchands européens à la fin du XVIe siècle, la ville succède à Vivi (1885-1886) comme capitale de l’Etat indépendant du Congo (1886-1908) puis du Congo belge (1908-1929). Ce statut prend fin avec le transfert de toutes les institutions politico-administratives à Léopoldville (Kinshasa). Pendant quarante-trois ans, Boma dont les Mboma sont les premiers habitants, est la vitrine du pays. La ville est prospère et exporte du copal, de l’ivoire, du bois, de l’huile de palme, du cacao, des bananes.
Boma tente de se moderniser mieux de se métamorphoser. Des rues, avenues et places publiques sont baptisées. Pour illustrer le pouvoir colonial, plusieurs constructions commencent à sortir de terre. Le symbole le plus emblématique est l’érection de la résidence du Gouverneur-Général sur la colline. C’est un bâtiment somptueux avec une structure en fer et de
grandes terrasses en bois. Le futur roi Albert, alors prince héritier de la couronne de Belgique, y a séjourné lors de sa visite au Congo en 1909.
Un site est choisi pour abriter l’essentiel des locaux du pouvoir et de l’administration. C’est le quartier colonial. D’autres bâtiments importants sont aussi construits pour que la ville réponde aux normes d’une capitale moderne. L’EIC ayant adhéré à l’acte additionnel de la Convention postale le 13 septembre 1886, un bureau des postes est bâti dès 1887 en face du port.
Les pièces détachées de la première église du Congo, la cathédrale Notre-Dame-de-l’Assomption, sont transportées depuis les ateliers de Namur puis remontées à Boma en 1890. Le clocher de ce lieu de culte en acier domine le centre-ville. Le fort de Shinkakata (1891) à 1,5 km de Boma est construit pour défendre l’accès du fleuve. Le Bâtiment de l’Etat-major de la Force Publique y est aussi érigé. Entre 1899 et 1912, est construit le chemin de fer du Mayombe reliant Boma et Tshela via Lukula sur une distance de 140 km. Il est desservi par les locomotives de la Société des Chemins de fer Vicinaux du Mayombe. Dans les années 80, les voies sont totalement démantelées puis réinstallées à proximité de Gbadolite.
Sur le plan de l’urbanisation, la ville est dotée d’une ligne de tram longue de 2 km entre Boma-Plateau et Boma-Rive. Elle est inaugurée en mars 1890. Le matériel roulant se compose de deux locomotives à vapeur. L’histoire note que le prince Albert l’a emprunté pour se rendre à la résidence du Gouverneur. Le tramway donnait la correspondance au chemin de fer du Mayombe. La ville accueille ses deux premières voitures en 1895.
Devenu un petit centre urbain important avec la mise en place des éléments de confort occidental sur le plan de la santé, des loisirs, de l’hygiène et des cultes, Boma, victime de son aménagement, fait face à un flux migratoire important.
Peu à peu, la métropole se désintéresse de Boma. Suite à sa position géographie trop à l’ouest, la ville finit par perdre son statut particulier. La décision de transférer la capitale administrative à Léopoldville est officiellement prise en 1923 sur ordonnance du Gouverneur-Général avec la création du district urbain de Léopoldville. Ce transfert est devenu effectif en 1929. La nouvelle capitale située en face de Brazzaville connait une croissance démographique impressionnante. A sa fondation en 1881, elle compte 4.000 individus, 11.000 en 1920 mais plus de 300.000 à la fin des années 50. Elle finit par dépasser le million d’habitants en 1970.
Samuel Malonga