RDC : APRES LA PRESIDENCE DE LA REPUBLIQUE, LE SENAT ?
RDC : APRES LA PRESIDENCE DE LA REPUBLIQUE, LE SENAT ?
Mettons les choses au clair. Sur Mbokamosika, nous ne faisons pas de politique. De politique au sens partisan du terme, bien-entendu. Car, nous ne roulons pour personne sinon pour la RDC.
En revanche, si faire de la politique, c’est de s’intéresser à la bonne gouvernance, à la saine gestion du bien public, à la rigueur dans la tenue des comptes et finances de l’état (c’est-à-dire à l’argent de tous les Congolais), à privilégier l’intérêt général contre le remplissage des gosiers et des ventres particuliers, alors oui ! Nous faisons de la politique.
Comme ces dizaines de lanceurs d’alerte, ces membres d’ONG de la société civile, ces militants pour les droits humains qui, aujourd’hui, au péril de leurs vies, investiguent, fouillent, traquent les travers de nos dirigeants et mettent souvent à jour des scandales retentissants.
A Mbokamosika, notre cœur de cible est et demeure la préservation et l’enrichissement du patrimoine culturel de la République Démocratique du Congo en particulier et de l’Afrique en général. Nous y travaillons depuis toujours.
Toutefois, cette noble mission ne saurait nous empêcher d’être attentifs à ce qui nous entoure, notamment la mauvaise gouvernance et la prédation de quelques-uns.
C’est ainsi qu’en attendant l’ouverture du procès de Vital Kamerhe ce lundi 11 mai 2020, un autre scandale semble pointer le bout de son nez. Cette fois, c’est Alexis Tambwe Mwamba, cacique parmi les caciques de la coalition FCC, qui est sommé de clarifier une situation pour le moins floue.
Tout commence le 26 avril 2020 lorsque Bijou Goya Kitenge, sénatrice du Haut-Katanga, membre du parti AFDC et Alliés qui a fait dissidence de la plate-forme FCC de Joseph Kabila, demande par écrit à Tambwe Mwamba des éclaircissements sur des travaux de réhabilitation de l’hémicycle du sénat.
Non seulement ces travaux n’avaient pas été budgétisés mais le président du Sénat a attendu les vacances parlementaires pour passer un marché de gré à gré (encore un) avec la société Modern Construction, laquelle s’est dépêché de préfinancer les dits travaux.
Plusieurs sénateurs rappellent que le budget avait pourtant été voté très récemment (mi-décembre). N’y figuraient que six travaux estimés à un peu moins de 3 millions de dollars. Or, les seuls travaux de l’hémicycle, miraculeusement sortis du chapeau par Tambwe, se montent à 4 millions de dollars.
Mieux ! Pour la sénatrice, personne ne s’était jamais plaint des actuelles installations. D’ailleurs, Bijou Kitenge Goya n’est pas la seule à s’inquiéter de ce marché douteux. L’Observatoire des dépenses publiques (ODEP) et le Groupe de réflexion et d’échanges sur les marchés publics en RDC (GREM) ont également réagi mardi 5 mai dans un communiqué. Selon les deux organisations, « l’absence de budget pour le marché est un obstacle rendant irrégulière la passation dudit marché ».
Par ailleurs, l’ODEP et le GREM rappellent que « cette salle des plénières du Sénat a été réhabilitée intégralement il y a moins de dix ans » et que les « travaux de modernisation n’étaient justifiés par aucune urgence impérieuse ». Elles appellent dès lors à identifier l’entreprise titulaire du marché et « vérifier ses liens avec les membres du bureau du Sénat ».
Le président du sénat a très mal pris la requête de Bijou Kitenge. A défaut d’exhiber des preuves convaincantes, il s’en est violemment pris à la sénatrice du Haut-Katanga dans des termes frisant l’injure, lors de l’ouverture de la session du 30 avril. Non sans avoir, détail révélateur, quasiment ordonné au premier ministre Sylvestre Ilunga de faire procéder d’urgence au remboursement du préfinancement de Modern Construction. Commissions et rétro-commissions obligent ?
Or, loin d’abdiquer, la sénatrice a demandé le 5 mai la constitution d’une commission d’enquête parlementaire sur ce qui a tout l’air d’une affaire de détournement. Dans la foulée, elle a déposé une plainte devant le parquet général de la cour de cassation de la Gombe pour <<imputations dommageables et injures publiques>> contre Alexis Tambwe.
Mais le meilleur est peut-être à venir. Modern Construction appartient à un jeune entrepreneur indien, arrivé au Congo sans le sou il y’a 25 ans et présenté aujourd’hui, dans certains milieux, comme l’un des hommes les plus riches du pays. Cet homme, c’est Harish Jagtani.
Simple hasard ou mauvais sort ? Ce même 30 avril, est interceptée sur le tarmac de l’aéroport de Gbadolite, dans le Nord-Ubangi, une cargaison d’armes et de munitions, descendues d’un cargo de la plus grande compagnie aérienne privée de RDC. Le propriétaire de cette compagnie ? Harish Jagtani,.
Nous reviendrons très prochainement sur le parcours de cet étonnant et discret personnage, qui doit sa fabuleuse et soudaine fortune à Joseph Kabila et aux siens, dont l’actuel président du sénat, Alexis Tambwe Mwamba. Harish Jagtani jouait le rôle de véritable éponge. En tant qu’éponge, il ‘’aspirait’’ l’argent des détournements et les ‘’recrachait’’ entre les bonnes mains.
Mais aujourd’hui, la machine semble s’être enrayée. Et de plus en plus de voix osent s’élever contre cette mafia.
Décidemment, les choses bougent en RDC. Nous ne pouvons que nous en féliciter. Mais également contribuer, à notre place, à l’émergence d’un véritable état de droit dans lequel la sortie du moindre dollar devra être justifiée.
SIMBA NDAYE