POUR LES 10 ANS DE MBOKAMOSIKA (Acte 2), par Simba Ndaye
POUR LES 10 ANS DE MBOKAMOSIKA (Acte 2), par Simba Ndaye
Tous les observateurs attentifs s’accordent à penser que la décennie ’70 fut sans aucun doute l’une des plus prolifiques mais probablement la plus fructueuse de l’histoire de la musique congolaise. Dans le cadre de cette mini-série que j’ai le plaisir de proposer aux Mbokatiers depuis le mois dernier, avec la décennie ’60 (nous y reviendrons), je vous invite à entrer de plein pied dans ces fameuses années ’70.
Sous trois angles :
- En délaissant volontairement dans le présent article les orchestres-institutions qui avaient déjà pignon sur rue sur les deux rives du fleuve Congo (OK Jazz, African-Fiesta, Bantous de la capitale etc…), pour nous intéresser aux jeunes ensembles underground qui allaient véritablement changer (en bien ou en mal ?) le visage de la musique congolaise.
- En continuant de proposer un regard sur la musique d’autres régions d’Afrique, en adéquation avec l’ambition de Mbokamosika d’être ‘’un lieu de rencontres et d’échanges entre les ressortissants d’une Afrique plurielle’’.
- En privilégiant de présenter, autant que faire se peut, d’authentique raretés qu’on ne peut écouter que sur Mbokamosika. Raretés offertes, encore une fois, par notre ami commun. Au passage, je sais que certaines de ces chansons sont aujourd’hui introuvables, même dans ces pays amis et frères.
1. ‘’Ezol’’ d’Hilarion Nguema et l’Afro-Succès du Gabon. Hilarion Nguema, auteur entre autres chansons de ‘’Quand la femme se fâche’’, ‘’Libreville’’, ‘’Gabon pays de joie’’, ‘’Trop bon trop con’’ etc…, est l’un des pionniers de la musique gabonaise moderne, avec ses alter-ego comme Pierre-Claver Akéndégué ou Oliver Ngoma.
2. ‘’Tika na silika’’, de Mputu et le Lipua-Lipua. Dois-je me répéter ? Voilà 7 ans que sur ce site, je répète que pour moi (cela n’engage que moi) Canta Nyboma Mwan Dido est probablement, et de loin, le chanteur le plus doué de cette génération bénie. Et Dieu seul sait s’il y’avait une sacrée concurrence. Au passage, je parie que Danos ne doit pas avoir la présente chanson chez lui. Une anthologie !
3. ‘’Santa Mutombo’’, de Jeff Luna et le Tao-Tao de Paris. On ne peut pas avoir vécu en France, en Belgique ou être simplement de passage à Paris dans les années ’70 sans aller danser avec le Tao-Tao, un groupe composé exclusivement d’étudiants originaires de toute l’Afrique centrale et même d’Afrique de l’Ouest : Congo, Gabon, Centrafrique ; Côte d’Ivoire etc… Et aussi incroyable que cela puisse paraître, cette composition de Jeff Luna, le soliste, est déroulée en lingala, langue que tous les chanteurs ne comprenaient et ne parlaient pas forcément. Admirable !
4. ‘’Na weleka te’’, de Lokombé et les Grands Maquisards. Bon c’est vrai. Pour beaucoup, l’âme et la voix des Grands Maquisards, c’était d’abord et avant tout celle de Daniel Ntesa. Mais c’était vite oublier un grand chanteur comme Lokombé. La preuve !
5. ‘’Papa Thomas’’ de Charlie Perrière et le Tropical-Fiesta de Bangui. Installés dans leur confort, le Centrafrican-Jazz et le Vibro-Succès, les deux ensembles historiques de Centrafrique, n’ont pas vu débouler le Tropica-Fiesta, ‘’l’orchestre des Jeunes’’, qui va tout ravager sur sa route. Cette chanson de 1973 en est la parfaite illustration.
6. ‘’Manta Lokoka’’, de Maurice Obami et les Manta Lokoka. Même analyse, au Congo-Brazza. Toute une flopée de jeunes ensembles comme Manta Lokoka, Sinza etc… sont venus bousculer les dinosaures. Les Bantous de la Capitale, le Negro-Band et autres Cercul-Jazz ont tremblé sur leur piédestal. Quelques-uns ne s’en sont jamais remis.
7. ‘’Moya’’, de Doh Albert de Côte d’Ivoire. Sans exagérer, cette chanson est le prototype même de ce qu’on peut appeler un succès continental. Je mets amicalement au défi quiconque prétendra ne pas avoir dansé sur cet air, surtout pas au ‘’Millionnaire’’, boîte sélecte entre toutes de la mégalopole ivoirienne. Albert Doh nous a quittés récemment. Eh ! Abidjan était vraiment doux…
8. ‘’Aneki’’ ,de Emile Soki Diazenza et le Bella-Bella. Sur Mbokamosika, tout ou presque a été dit sur le Tout Petit, le Prince de la musique congolaise. Il n’empêche ! Y’a-t-il eu en cette période un compositeur de la trempe du cadet des frères Soki ? J’en doute. Et sa fin tragique n’a fait qu’ajouter à la légende. Cette chanson me donne des frissons, surtout avec la voix si mélodieuse de Tedia Wunumbakidi
9. ‘’Isia’’, de Ange Linaud et le Super Boboto. Le commentaire plus haut sur Manta Lokoka s’applique à la virgule près au SBB. Cet ensemble, qu’on a pu comparer au Negro-Succès de Siongo Bavon ou encore au Vévé de Kiamuangana Mateta, a bouleversé le paysage musical de nos frères d’en face. Edifiant !
10. ‘’Sikinebe’’, de Likinga et le Zaïko Langa-Langa. C’est également entendu. Le Zaïko a révolutionné la musique congolaise. Pour le meilleur comme pour le pire, c’est selon. Pour cela, les années ’70 sont vraiment une décennie charnière. D’autres en ont parlé mieux que moi. C’est pourtant toujours un bonheur d’écouter Likinga, Jossart, Ya Lengos et tous leurs compères. Nostalgie !
Bonne écoute et bonne fin de semaine à tous.
Simba Ndaye