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Publié par Marie-Amaëlle Touré / Le temps

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Joseph Kabila et son clan accusés d’avoir détourné des millions de dollars au Congo, UBS impliquée

 

Plusieurs médias internationaux et ONG ont pu consulter des documents bancaires mettant en cause l’ancien président congolais dans d’importants détournements de fonds publics. La filiale genevoise d’UBS serait impliquée, a révélé vendredi Public Eye

 

 

Marie-Amaëlle Touré

Publié lundi 22 novembre 2021 à 05:09
Modifié lundi 22 novembre 2021 à 09:42

Cent trente-huit millions de dollars. Cette somme mirobolante est celle qu’aurait détournée des caisses de l’Etat Joseph Kabila, ancien président de la République du Congo. L’étendue de l’affaire intitulée «Congo Hold-Up» a été révélée vendredi par un consortium de médias internationaux et d’ONG, dont Public Eye. Sous la coordination du réseau d’investigation European Investigative Collaborations (EIC), ces médias ont analysé pendant six mois les 3,5 millions de documents et de transactions bancaires issus de la filiale congolaise de la BGFIBank, obtenus par la Plateforme de protection des lanceurs d’alerte en Afrique (Pplaaf) et Mediapart.

 

Le site d’information français détaille ainsi comment l’ancien président congolais et certains de ses proches ont, pendant plusieurs années, détourné les deniers publics émanant des impôts, des aides internationales, des élections ou encore des routes, en encaissant d’importantes sommes sur les comptes de la société Sud Oil à la BGFIBank, détenue par les proches de Kabila. «Les documents de Congo Hold-Up, la plus grande fuite de données du continent africain, exposent aussi le rôle d’intermédiaires financiers suisses et les manquements de la compliance bancaire – dont celle d’UBS – dans des opérations financières et immobilières douteuses qui ont contribué à détourner les richesses du Congo», appuie l’ONG Public Eye.

Lire aussi Les leçons africaines des Pandora Papers

Sud Oil, la «siphonneuse»

Que ce soit 7,3 millions de dollars versés par l’ONU dans le cadre d’une mission de maintien de la paix, 3,2 millions appartenant à la société Foner gérant les routes congolaises ou encore 30 millions détenus par la banque centrale du pays, l’ensemble de cet argent, le peuple congolais – dont 70% vit avec moins de 2 dollars par jour – n’en a jamais vu la couleur. Il a soigneusement été transféré sur les comptes de la société Sud Oil, au sein de la BGFIBank à Kinshasa contrôlée par Gloria Mteyu et Francis Selemani, respectivement sœur et frère adoptif de l’ancien président Kabila. Entre opérations bien calculées, faux libellés et transactions antidatées, la BGFIBank «a fait preuve d’une incroyable ingéniosité financière pour aider le clan Kabila à s’enrichir», analyse Public Eye.

«Sans employés, sans numéro fiscal ou de TVA, Sud Oil a toutes les caractéristiques de la société écran. Officiellement active dans le secteur immobilier, elle brasse des sommes colossales, réalisant de mystérieuses transactions internationales, rarement justifiées par des documents, notamment au travers de banques suisses», poursuit Public Eye. On apprend ainsi que la première transaction de Sud Oil avait pour destination la Suisse et un compte bancaire auprès d’UBS Genève. Elle aurait servi à financer le bâtiment qui abrite la société à Kinshasa.

 

Ce compte «s’est vu crédité, autour d’une transaction immobilière fin 2013, de 12 millions de dollars à la provenance pour le moins problématique. Cet argent […] a permis à la société écran des Kabila d’acquérir le bâtiment du 43, avenue Tombalbaye. Celui qui lui sert aujourd’hui officiellement de bureau, détaille l’ONG. L’argent qui a servi à l’achat de cet immeuble a été siphonné dans les caisses de l’Etat congolais. La transaction n’aurait pas été possible sans la tolérance des services de conformité d’UBS», assène Public Eye, rappelant la loi contre le blanchiment d’argent qui, depuis fin 2013, exige des intermédiaires financiers diligence et transparence dans le cadre d’une transaction.

De la Belgique au Congo

Des liens étroits entre un homme d’affaires belge et le clan Kabila au manque de diligence d’UBS, Public Eye a méticuleusement décortiqué les transactions menées de Kinshasa à Genève. «Comme le révèlent les données de Congo Hold-Up, c’est sur le compte privé de l’homme d’affaires belge Philippe de Moerloose auprès d’UBS de Genève que Sud Oil a versé des millions pour l’achat du bien immobilier. Ces fonds sont arrivés sans peine en Suisse.»

Si le Belge reconnaît une relation professionnelle avec Joseph Kabila, il réfute, par ailleurs, toute «allégation d’association personnelle […], de jeux d’influence illégitimes et de toute autre forme de pratiques malsaines», rapporte Public Eye. Interrogé par l’ONG, Philippe de Moerloose «a confirmé la transaction pour un «immeuble industriel et de bureaux situé avenue Tombalbaye» et avoir perçu, en plusieurs tranches, les 12 millions sur son compte auprès d’UBS. Ce dernier assure également avoir exigé une copie du registre des actionnaires de Sud Oil, celui-ci ne mentionnant aucun membre de la famille Kabila.

La «compliance» d’UBS pas alertée

Pas de commentaires du côté d’UBS. La banque rappelle «qu’elle n’est pas autorisée à commenter ses relations d’affaires et se borne à répondre qu’elle applique des règles strictes en matière de diligence raisonnable et de lutte contre le blanchiment d’argent», souligne Public Eye, avant de questionner la réactivité des services compliance de la plus grande banque de gestion de fortune du monde.

Lire également:  Deux milliards d’euros d’amende requis contre UBS en appel

«La nature de cette transaction immobilière ou l’origine des fonds, provenant de la Banque centrale du Congo, ne semblent pas avoir suscité d’alerte au sein des départements conformité d’UBS, où Philippe de Moerloose a ses comptes, alors qu’il n’a officiellement aucune implantation en Suisse. Pas plus que son montant: 12 millions de dollars pour un bâtiment qui sert aujourd’hui principalement de garage.»

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L
Cela fait mal au coeur. Mais comme par le passé, on nous parle des millions de dollars ou des milliards de dollar pour Mobutu, c'est une belle histoire à écouter. Les Congolais ne reverront plus la couleur de cet argent. Et le régime actuel avec ses frasques va nous donner aussi un jour ses "Hold up".
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