RDC – Ukraine, deux poids deux mesures
Le 24 février 2022, le monde apprend l’invasion de l’Ukraine par la Russie. La guerre sévit de nouveau en Europe. Elle est aux portes de l’Union européenne et aux frontières de l’Otan. Bien avant, l’Europe a tenté de l’éviter. En vain. Vladimir Poutine suit sa logique et ne cède en rien. La survie de la Russie, quasiment encerclée par les pays membres de l’Otan, est en jeu.
Solidaire avec les Ukrainiens, l’Occident s’émeut. Et faute d’intervenir militairement, il envoie des armes, de l’argent, des vivres, des rations ; prend des sanctions économiques, financières voire sportives à l’égard de la Russie. Même les oligarques et amis de Poutine ne sont pas épargnés. Les médias occidentaux parlent de l’évolution de l’avancée russe, de leur encrage en terre ukrainienne. Des images de destructions et des déplacements forcés des Ukrainiens qui fuient la guerre alimentent les journaux télévisés ponctués par les reportages de leurs envoyés spéciaux.
Solidaire, l’UE active pour la toute première fois une directive européenne jamais appliquée : la protection temporaire. Les Ukrainiens qui cherchent refuge dans les pays membres de l’Union européenne pourront rapidement obtenir un permis de séjour, être en mesure de travailler, bénéficier d'un logement adapté, d'un accès à l'aide sociale, à l'assistance médicale et à l'éducation. Aux Pays-Bas, le transport public est gratuit pour tout Ukrainien qui arrive dans le royaume pour lui permettre d’atteindre facilement les lieux déjà aménagés pour les accueillir, une première quand on connaît les contraintes de la politique néerlandaise en matière d’immigration et d’asile. Dans les terrains de football, plusieurs capitaines des équipes européennes portent des brassards aux couleurs de l’Ukraine. Des manifestations sont organisées dans plusieurs villes. L’âme de la ″civilisation″ euraméricaine bat au rythme de la guerre voulue par Vladimir Poutine.
Si les Ukrainiens ont la facilité d’entrer sans contrainte dans les pays de l’UE, les Africains par contre sont victimes de racisme et de négrophobie sur les routes de l’exil. En amont, la police ukrainienne les empêche de prendre les trains ou les autocars de l’exode. En aval, les garde-frontières polonais les empêchent d’entrer dans leur pays.
Au-delà de la souffrance du peuple ukrainien, ce conflit armé a montré son caractère discriminatoire à l’égard de l’agression dont le Congo est victime. Dès les premières de l’invasion russe, le monde entier est au courant el suit l’avancée des troupes de Poutine minute par minute. Pourtant au Congo sévit une guerre qui dure depuis plus de deux décades. Une guerre oubliée qui a déjà fait des millions de morts.
Les Congolais sont un peuple qui ne compte pas. Les actions d’éclat de sa diaspora ne paraissent jamais dans les médias occidentaux. Les débordements des combattants lors du concert de Fally Ipupa en février 2020 ou la mobilisation faite lors du sixième sommet entre l’Union européenne et l’Union africaine à Bruxelles n’ont pas fait exception. L’Occident est dans sa logique d’occulter le conflit armé en RDC à cause de gros enjeux financiers en présence.
L’Ukraine n’est pas le Congo. Si son agression est devenue l’affaire de la communauté internationale, l’Est du Congo par contre habité par des peuplades de race noire n’est qu’un domaine d’exploitation. Le sort de la population locale n’émeut guère, sinon comment comprendre le silence de la communauté internationale face à ces massacres devenus monnaie courante ? Elle qui est à la fois juge et partie, tire plutôt les ficelles de cette guerre qui en réalité est un véritable business. Avec des dirigeants complices et une élite politique corrompue jusqu’à la moelle des os, les Congolais sont les vrais perdants.
Les Occidentaux ne sont intéressés que par les richesses stratégiques enfouies dans leur sous-sol. La communauté internationale applique la politique de deux poids deux mesures : défendre à tout prix l’Ukraine et oublier l’imbroglio congolais dont elle est la marraine afin de mieux piller le pays, cette poule aux œufs d’or qui renfloue les caisses de grands firmes internationaux.
Samuel Malonga