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Publié par Samuel Malonga

L’homme a plusieurs casquettes. Artiste-musicien, concepteur, metteur en scène, arrangeur, il a dirigé le ballet national pendant 25 ans. 

Né Oscar Matusongwa en 1948 à Kinshasa, il remplace son prénom par le nom de sa mère pendant la période de le politique du recours à l’authenticité. Il devient Diabanza Matusongwa à partir de 1971. Il s’intéresse à la musique à un âge très tendre. A la maison, il y a la guitare du frère aîné qu’il essaie de gratouiller alors qu’il est encore gamin. Après des humanités gréco-latines à l’athénée de Ngiri-Ngiri, il passe au Conservatoire national de musique et d’art dramatique (actuel INA) où il étudie la musique. Comme il est amoureux des activités en plein air, il se retrouve très vite dans Chem-Chem Yetu du prêtre hollandais Bernard Van den Boom où il joue la guitare solo. Ce groupe lui permet de se découvrir, de tracer la voie future qu’il suivra dans le monde du spectacle. Ce groupe est en quelque sorte l’ébauche de ce que deviendra sa carrière. Ensuite, Diabanza se met à accompagner les vedettes féminines de la chanson. Il n’a presté que dans des orchestres dirigés par des musiciennes. Il a notamment été chez Etisomba, Abeti, Miss Bora et Mpongo Love. Cette dernière le sort de l’ombre et le fait réellement connaître aux mélomanes à travers la chanson Bakake, une vraie merveille !

 

Attiré par la recherche alors qu’il trouve la musique moderne trop ennuyeuse et routinière, sa route croise celle de Ray Lema qui lui parle du projet qu’il a avec le Belge Alain Moens : la création d’un groupe de ballet. Cette initiative leur est venue en tête après le passage à Kinshasa du célébrissime ballet guinéen. Cette rencontre va bouleverser sa vie. Oscar Diabanza met aussitôt un point final à la rumba pour aller à la rencontre de l’art pur, celui qui a trait aux traditions, à la danse tribale, à la chorégraphie folklorique où raisonnent les authentiques airs ancestraux. Peuplé par pas moins de 450 tribus, la RDC possède une richesse culturelle inouïe qu’il faut exploiter et valoriser. L’homme va puiser dans ce terreau quasi intarissable les essences nécessaires pour la création de ses spectacles. Les danses traditionnelles, les légendes d’antan mouillées dans les mythes tribaux, les folklores ethniques aux langages subtiles font l’objet de ses recherches.

Artiste atypique, Oscar Diabanza passe toute sa carrière de musicien au Ballet national du Zaïre qui dépend du Théâtre national Mobutu Sese Seko dirigé par le professeur André Yoka. Il s’occupe d’abord de la "section musique″ de cette structure avant d’en devenir le directeur en remplacement de Ray Lema parti en France. Dans le domaine du spectacle, il fait beaucoup de créations artistiques et conçoit la musique de certains ballets. Parmi ses œuvres, il y a lieu de citer L’épopée de Liandja (légende de la création du monde selon les Nkundo/Mongo), Lokole, Kenge (qui a fait un triomphe aux États-Unis), Elima Ngando (un vrai classique), Bomoko, etc. Oscar Diabanza est un expert du spectacle et de la chorégraphie. C’est l’homme des ballets traditionnels et folkloriques qui font vivre l’âme du Congo profond. Dans la rumba, il n’a écrit qu’une seule chanson. Cette œuvre unique gravée sur disque qui été magistralement interprétée par Mpongo Love a marqué sa vie. Ce come-back à ses premiers amours lui a permis d’étaler son art d’écrire de beaux textes musicaux pour la rumba congolaise. Du spectacle traditionnel à la musique moderne, il n’a fait qu’un pas.

 

Sortie en 1983 dans un LP contenant cinq chansons, Bakake captive aussitôt les mélomanes. C’est alors que les amoureux de la bonne musique découvrent cet homme quasiment inconnu du grand public. En réalité, Oscar Diabanza n’a pas composé cette œuvre pour Mpongo Love mais plutôt pour la chanteuse Sophie Layla. Un beau jour, il est à la Renapec (aujourd’hui RTNC 2) avec elle pour l’enregistrer. Présente au studio, Mpongo Love en la découvrant en est aussitôt tombée amoureuse. Charmée par cette belle mélodie, elle fait aussitôt la demande à son compositeur pour la chanter. Oscar Diabanza saisit cette chance inespérée pour le devenir de son titre. Sans tergiverser, il accepte que l’une des plus belles voix féminines du Congo interprète sa chanson. Joli texte, belle mélodie, excellente orchestration, Bakake est arrangé par le maestro Souzy Kaseya. De cette œuvre, sa fille Sandra Mpongo dira plus tard que par des paroles simples rythmées à la rumba, le parolier Diabanza a su trouver les mots et les images pour exprimer les sentiments d’une personne déçue par l’amour. Quant à la version chantée par Sophie Layla, elle a sûrement été oubliée et jetée dans les poubelles de la  musique pour céder la place à celle de Mpongo Love.

En 1985, l’ONU célèbre l’Année Internationale de la Jeunesse. A cet effet, Oscar Diabanza compose la musique des textes écrits par Mobyem Mikanza dans l’album Ngembo. Ce disque-souvenir du Théâtre National Mobutu Sese Seko a été réalisé pour sensibiliser la population aux problèmes de la jeunesse délinquante.

 

Après le ballet national, Oscar Diabanza travaille pour son propre compte. Il a dirigé en première mondiale une chorale à Haïfa en Israël devant 10.000 spectateurs venus du monde entier. Toujours dans la logique des rendez-vous culturels et des échanges qui l’anime, il participe en 2014 au festival culturel Yambi à Bruxelles avec le spectacle Musique Croisée dont il a assuré la direction artistique.

Depuis la disparition du ballet national consécutif au manque de financement de l’Etat, l’homme de culture Oscar Diabanza est amer. L’art au Congo navigue dans un monde pourrit par la corruption, dit-il. L’absence des concours de la chanson et des festivals ne permet pas aux jeunes d’étaler leur talent. Les jeunes ne sont pas poussés vers la recherche et le travail. Son plus grand souci est le fait que jusqu’à ce jour sa relève n’est pas encore assurée.

Samuel Malonga

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Commenter cet article
S
@ Messager<br /> Merci pour la correction
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M
Je t'en prie Sam
S
Erratum<br /> Notre artiste s'appelle OSCAR DIABANZA MATUSONGWA et non Mutusongwa comme écrit dans le titre. Que nos lecteurs veuillent bien nous excuser.
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