LA VIE DANS LES ORCHESTRES DE KINSHASA
LA VIE DANS LES ORCHESTRES DE KINSHASA
Qu’il me soit permis de jeter un coup d’œil rétrospectif sur la vie des orchestres à l’époque de Kin La belle, Kinshasa Bisengo, Kinshasa Poto Moyindo chanté par Wendo Kolossoy, Kinshasa Kiese Yai vanté par le défunt Mateta Kanda. C’était la belle vie caractérisée par l’harmonie, l’amour du prochain, l’entente et une concurrence loyale entre les musiciens d’un même orchestre. Quand on considère les interviewes ainsi que les images sur le 40eme anniversaire de BMM, on se rend vite compte qu’il y avait une compréhension mutuelle et une bonne ambiance de «Bana quinze ans» dans le groupe. Bavon était l’ami de Didi Kalombo, Bokenenge Rocky, Asssossa, Mutshokele Gaspy Mutshokele, Moreau-Maurice, de Rubens et consorts. C’était la joie et le plaisir de vivre et de travailler ensemble avec les copains. Ces jeunes gens avaient le verbe choyé, un langage qui bannit les futilités et la bassesse, l’habillement sévère, pas du genre de ceux qui passent à la télé pour vanter ses costumes ou chaussures. Bref, c’étaient des jeunes hommes sympathiques voulaient plaire, rester digne de la tradition de «Bana quinze ans», cette tradition faite de gloire et des hauts.
Le musicien cherchait à se faire connaitre à travers ses œuvres et non à travers la sape. L’orchestre constituait une véritable famille où chacun devait se sentir à l’aise. Le fondateur de l’orchestre était le véritable chef de famille ou le patron. A l’instar de l’image ci-jointe, Bholen était le patron de l’orchestre Negro-Succès. L’orchestre était une entreprise dans laquelle le musicien allait travailler pour toucher un salaire modique qui lui permettait de bien vivre. L’artiste musicien de l’époque avait son propre moyen de transport, une voiture ou une vespa pour ses propres déplacements ou pour se rendre aux répétitions. L’orchestre disposait d’un minibus pour le transport des instruments de musique. Le T.P. OK Jazz avait un charroi automobile important pour cette fin. Les patrons des orchestres d’aujourd’hui aiment rouler dans les voitures luxueuses mais sont incapables de s’acheter un minibus pour l’orchestre. Faire de la musique était pour un musicien son véritable gagne-pain. Il ne vivait pas de la mendicité. Le fait pour Franco de dire à son jeune frère «Osalaka mosala. Vas chez ton patron Bholen aya na mbongo osomba voiture» se veut pour preuve. Le patron Bombolo a pris la requête de BMM très au sérieux et il s’est exécuté sans délai. Ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui. Combien de fois n’avons-nous pas appris que le patron de tel orchestre ne veut pas aider son musicien pour ses soins médicaux ou le cas d’hospitalisation d’un membre de sa famille restreinte.
Les concerts et la vente de disques procuraient des ressources nécessaires à l’orchestre. A la fin de chaque fin du mois, le patron faisait la comptabilité sur la vente des disques pour retirer les droits de l’orchestre. Aujourd’hui avec la piraterie galopante, la vente des disques est devenue tout un cauchemar. C’est un manque à gagner énorme pour l’orchestre. La seule source de revenus, c’est soit les concerts, soit les contrats de production. Ici les musiciens se font flouer. Les patrons de certains ensembles musicaux sont très égoïstes. Ils se taillent toujours la part du lion et n’ont aucun souci du bien-être de leurs musiciens. Ils empochent d’importantes sommes d’argent pour ne donner que des miettes à leurs musiciens. C’est devenue une histoire de Mboloko l’antilope et le chien. Une fois l’antilope attrapée, le chasseur s’approprie du gibier pour ne donner au chien que du sang. Et mon confrère et aîné Ekamba Eo Leka d’ajouter « Mobini ya zoba bapesaka se kwanga po azanga niama ya koliela na yango»
O tempora! O mores! (Traduisez par O temps! O mœurs). A chaque époque ses mœurs. Ce qui a fait dire à Josky Kiambuka «Mukizo! Kanisa tango tozalaka» Si la vie pouvait toujours recommencer comme le temps que nous indiquent les aiguilles d’une montre.
Zéphyrin Kirika Nkumu Assana